Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/470

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accompli. Il l’a vue hésitante, incertaine, divisée contre elle-même, et pendant que les ambassadeurs divisés, en effet, et impuissants le harcelaient, en pleine tuerie, de ridicules propos de philanthropie et de réformes, il achevait, lui, l’extermination à plein couteau, pour se débarrasser de la question arménienne, pour se débarrasser aussi de l’hypocrite importunité d’une Europe geignante et complice comme vous l’êtes. (Applaudissements à l’extrême gauche. — Interruptions.)

En même temps, il se jouait de l’Europe, il se jouait de vous et de l’humanité. Ah ! vous avez décidé qu’il y aurait à Erzeroum une commission d’enquête sur les premiers massacres de Sassoun ; vous avez décidé que des délégués européens seraient adjoints à cette commission d’enquête ! Mais, lisez, monsieur le ministre — vous les avez lus, assurément, — les procès-verbaux de la commission, et vous verrez que la commission turque a toujours refusé aux délégués européens de se transporter sur les points où s’étaient produits les plus abominables massacres afin de recueillir subitement sur place des témoignages sincères ; vous verrez aussi par le procès de Tamayan en 1894, dont parle le consul d’Angora, à quels procédés sauvages le gouvernement du Sultan avait recours pour obtenir en sa faveur des témoignages mensongers. Il s’agissait de faire dire aux Arméniens par force, en leur