Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/532

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mandée. Il y a, à la cour et dans l’administration, des influences dont j’aurai à vous parler longuement ; elles se sont exercées avec un singulier entêtement et un regrettable succès à propos de la visite du Président. » — Ces lignes sont signées de M. Latapie, un de nos plus violents adversaires, un des plus fougueux amis du ministère, et, quand il n’est pas animé d’un parti pris personnel ou d’une haine locale, observateur pénétrant. Elles sont caractéristiques.

En France, avec des apparences différentes, même politique, même sournoiserie : ici on fait appel à la rue, on montre le tsar, et on montre Félix Faure ; les ministres, portant au front l’auréole de l’alliance et protégés par le saint nom de la Russie, se dressent en apothéose sur la badauderie des foules ; mais quand on leur demande ce qu’est l’alliance, où elle tend, à quoi elle engage, silence et nuit ; les feux d’artifice s’éteignent, et M. Hanotaux tout seul sait ce qu’a signé M. Félix Faure. Et c’est une merveille, j’en conviens, de donner à toute cette politique un air populaire en jetant à la foule des mots, des sons de cloches, des lueurs de lampions et des frissons de drapeaux, et en lui cachant toute la vérité, toute la réalité, toute la substance des choses. C’est ainsi que nos dirigeants peuvent traverser en triomphe les multitudes badaudes après avoir proclamé que la mutilation définitive de la France, le servage éternel des provinces conquises, la consécration