Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/534

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théâtre se promenaient solennellement les diplomates, c’étaient les porteurs de valeurs ottomanes qui dans les coulisses faisaient la loi. » — Soit, et voilà des affirmations d’une exceptionnelle gravité. Mais quelles conclusions tire M. Bourgeois ? Il n’ose ni remonter aux principes, ni aller aux dernières conséquences.

S’il est vrai que la politique européenne est livrée à la seule puissance de l’Argent, s’il est vrai que l’autonomie de la Crète, la vie de deux cent mille Arméniens, les réformes réclamées par la partie saine du monde musulman, s’il est vrai que tout cela n’a pas pesé une once dans la balance des intérêts financiers, comment M. Bourgeois peut-il se féliciter de la situation extérieure ? Comment peut-il se réjouir pour la France de l’alliance franco-russe, puisque cette alliance n’a fait que consacrer la domestication de la France en attachant celle-ci à la Russie domestiquée elle-même par les banquiers européens ? Dénoncer la prédominance de l’Argent dans la question orientale et exalter une alliance qui sert avant tout les intérêts des hommes d’argent, c’est une singulière contradiction ; et c’est par ces contradictions que le radicalisme gouvernemental périra.

De même, d’où vient cette puissance des hommes d’argent ? D’où vient qu’ils peuvent disposer pour leurs opérations et spéculations de capitaux énormes ? Ces capitaux mêmes, d’où viennent-ils ? Est-ce qu’ils