Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/543

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réglées que par une discussion au grand jour, par un appel incessant au bon sens et à la loyauté de deux grands peuples. N’ayons pas d’arrière-pensées à l’égard de l’Angleterre ; reconnaissons bien haut les droits importants que lui donnent en Égypte une longue occupation et une œuvre méthodique d’organisation ; ne jouons pas contre elle, en Égypte, le rôle fâcheux et aigre joué contre nous en Tunisie par les Italiens ; ne nous étonnons pas qu’elle veuille assurer du Caire au Cap la continuité du passage ; et quand ces malentendus, entretenus par la presse la plus frivole et le chauvinisme le plus aveugle, auront été dissipés, il nous sera plus aisé de faire valoir devant le monde et devant l’Angleterre elle-même le droit certain de la France à s’ouvrir un débouché de l’Afrique centrale vers le Nil. Autant l’occupation de Fashoda est intempestive, autant toute connivence de la diplomatie française avec Abd-ul-Hamid et Guillaume II serait absurde et coupable, — autant les Anglais seraient inexcusables s’ils prétendaient bloquer la France dans le bassin du Congo, et refuser aux autres nations des garanties pour le libre accès et la libre navigation du Nil.

Il faut que des deux côtés de la Manche la démocratie libérale et le prolétariat socialiste s’emploient à ramener la question à ces termes ; il ne s’agit pas seulement de prévenir pour demain un conflit qui serait un malheur pour le monde civilisé : il faut dissiper les