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CHAPITRE V

la sensation et la forme


La quantité étant ainsi comme intérieure à la sensation n’empêche point celle-ci d’avoir sa forme propre, son idée ; nous avons vu que, dans le mouvement, la quantité ne mettait point obstacle à la forme, qu’au contraire elle y aidait. À plus forte raison, en est-il ainsi dans la sensation, car, si le mouvement est une forme, il est surtout comme intermédiaire entre la puissance et l’acte. Il exprime surtout ce qui se mêle de quantité continue, homogène et mesurable à tous les actes de toutes les forces de l’univers. Il est le côté de l’acte qui est tourné vers la puissance, l’aspect de la forme qui regarde la quantité. Au contraire, la sensation, tout en retenant et utilisant la quantité, est avant tout qualité, forme, détermination.

Toute sensation est beaucoup plus déterminée que les mouvements ou les rapports quantitatifs auxquels elle correspond. Deux notes sont entre elles dans le rapport de un à deux ; faites varier la seconde, de façon qu’elle soit représentée par deux et une fraction infinitésimale aussi petite que vous voudrez, la note n’est plus juste ; et ainsi une altération infinitésimale dans la quantité se traduit par un trouble dans la qualité qui peut, en