Page:Jaurès - De la realite du monde sensible, 1902.djvu/214

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lumineux et les rayons calorifiques agissent différemment, non seulement sur nos sens, mais sur les végétaux. La longueur d’onde n’est donc point indifférente aux conditions secrètes de la vie. Quand on connaîtra mieux les mouvements de l’éther, on comprendra peut-être qu’une diminution presque insensible dans la vitesse des vibrations éthérées suffit à modifier les relations fondamentales de l’éther et de la matière, et à manifester dans le spectre, ici la couleur, là la chaleur. Je crois même que cette sorte de crise soudaine que subit le spectre en passant de la lumière à la chaleur, aidera la science à comprendre les mouvements internes de la matière et leurs relations avec l’éther. Nous insisterons sur ce point quand nous essayerons de définir la lumière et la chaleur. Je voulais démontrer seulement, à cette place, qu’il était plus que possible, qu’il était probable que nous connaissions toutes les variétés existantes de la couleur. Lorsque, selon le beau récit biblique, Dieu, après le déluge, a détendu son arc sur les nuées et fait briller l’arc-en-ciel en signe de paix, il a épuisé, dans ce lumineux sourire, toutes les couleurs de l’univers.

L’homme est en relation avec la terre par la résistance, avec les objets individuels par la résistance aussi et le sens de la forme, avec la vie par le goût et l’odorat, avec l’éther par la lumière et la chaleur ; et par la couleur, il perçoit, comme nous le verrons, les relations les plus délicates de la matière pesante et de l’éther impondérable. Il n’y a donc pas, semble-t-il, dans l’univers où il vit, un seul élément qui ne soit comme représenté dans la sensibilité de l’homme. On nous dira, sans doute, qu’il y a là un cercle vicieux, car, ne connaissant les choses que par les sensations qu’elles éveillent en nous, il est naturel que toute chose connue soit pour nous