Page:Jaurès - De la realite du monde sensible, 1902.djvu/39

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pas une abstraction ou une fiction géométrique. Elle est étendue en longueur, parce que l’activité qui se manifeste par le mouvement n’est pas une activité pure : elle se développe dans la quantité, c’est-à-dire dans l’être indéterminé et en puissance ; et elle reste en contact avec la quantité et la puissance par une des dimensions de l’étendue, la longueur. Mais en même temps, comme cette activité du mouvement se développe suivant une loi et vers un but, comme elle est déterminée en direction, elle échappe à l’indétermination absolue de l’espace et elle n’a qu’une dimension, et même, comme elle n’est en contact avec l’espace que dans sa longueur, c’est-à-dire dans sa direction même, c’est-à-dire dans sa détermination, la ligne semble réaliser la détermination absolue dans l’absolue indétermination de l’espace. Voilà pourquoi tout mouvement, c’est-à-dire toute activité, peut se traduire par une ligne, et le mouvement même du monde en son entier peut se ramener à une ligne idéale, à cette ligne invisible décrite par le temps, dont parle M. Lachelier.

Sans doute, la surface est, en un sens, plus réelle que la ligne, et le volume plus réel que la surface ; car, par la surface et le volume, l’indétermination absolue de l’être, exprimée par l’indétermination absolue de l’espace, entre continuellement sous la détermination de la forme et de la loi. Mais il faut bien observer que la surface en tant que surface et le volume en tant que volume ne sont que quantité, c’est-à-dire indétermination. Ce qui les détermine, c’est la loi suivant laquelle une ligne les a engendrés ; en sorte que la ligne, symbole figé du mouvement, reste la détermination suprême. Cela explique son caractère à la fois réel et idéal, ou, plutôt, sensible et métaphysique. Lorsque nous voyons