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HISTOIRE SOCIALISTE


« Nous avons désigné les objets sur lesquels pouvait s’exercer la compétence des conseils provinciaux. Nous avons déclaré ne pouvoir participer en rien dans l’ordre des objets spirituels à des délibérations émanées d’une puissance purement civile (l’Assemblée Nationale) qui ne peut pas s’étendre sur la juridiction spirituelle de l’Église. »

« Nous avons réclamé, pour les objets purement spirituels, le recours aux formes canoniques et pour les objets mixtes, le concours de la puissance civile et de la puissance ecclésiastiques. Nous avons refusé le serment sur tout ce qui concerne les objets spirituels dépendant de l’autorité de l’Église. Nous avons enfin demandé que l’Assemblée Nationale suspendit l’exécution des décrets dans les départements, jusqu’à ce que l’Église eût manifesté son vœu par la voix de son chef visible (le pape) ou que les formes canoniques eussent été remplies. »

Les archevêques de Rouen, de Reims, d’Aix, d’Arles, d’Albi, de Toulouse, de Bourges, les évêques de Poitiers, de Montauban, de Condom, de Beauvais, du Mans, de Nîmes, de Rodez, de Limoges, de Montpellier, de Perpignan, d’Agen, de Chartres, de Laon, de Saint-Flour, de Châlons-sur-Marne, d’Oléron, de Dijon, de Saintes, de Coutances, de Luçon, de Clermont, d’Uzès, de Couserons, tous membres de l’Assemblée, avaient signé ce document. C’était le signal de la guerre générale.

En Vendée, l’évêque de Luçon, M. de Mercy, s’était appliqué plus particulièrement dès les premiers jours à fomenter l’agitation et le fanatisme. L’Assemblée capitulaire de Luçon adressa en décembre 1790 à l’Assemblée une pétition très habile où elle affectait de se désintéresser des biens d’Église, où elle affectait aussi à l’égard des protestants nombreux dans la région une demi-tolérance, mais où elle combattait la liberté des cultes.

« Le clergé de France, écrivaient les chanoines de Luçon, a été dépouillé de tous les biens qu’il possédait, nous nous sommes interdit la plainte ; nous nous sommes tus… Mais de plus grands intérêts nous forcent aujourd’hui de parler. La Religion, tremblante, éplorée, nous ordonne de mettre sous les yeux de l’Assemblée Nationale ses inquiétudes, ses alarmes… Jamais l’intention des représentants de la Nation n’a pu être de refuser à la religion catholique, à l’unique religion de l’empire français, le tribut d’hommages que depuis quinze siècles lui ont payé avec reconnaissance toutes les Assemblées Nationales qui les ont précédés. La reconnaître pour la seule religion de l’État, interdire tout autre culte public et solennel, était un devoir prescrit par tous les mandats des provinces… »

« Cependant des écrits périodiques répandus avec profusion se sont empressés de publier que la motion faite dans l’Assemblée de reconnaître la religion catholique pour la religion de l’État, et de lui assurer un culte solennel exclusif, avait été repoussée. Les termes du décret rendu sur cet objet ont