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Page:Jaurès - Histoire socialiste, II.djvu/118

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étourdies et inexactes qui allumaient peu à peu dans les esprits le feu de la guerre. Daverhoult poussa aussi à la guerre, dans un discours où abondent les contradictions. Sa thèse peut se résumer ainsi : Les émigrés ne sont encore ni très nombreux, ni très dangereux ; mais leur parti peut se grossir, et ils peuvent devenir un péril, s’ils dirigent une attaque imprévue contre la France, en un moment où celle-ci serait déchirée intérieurement par les factions. Les puissances étrangères sont divisées notamment par la question de Pologne, mais le jour où l’impunité des émigrés les aurait persuadés de notre faiblesse, le jour où la France déchirée par des luttes intestines semblerait une proie facile, elles se réconcilieraient pour nous attaquer. Conclusion : il faut prendre l’offensive.

« Les émigrés comptent sur les troubles intérieurs qu’ils excitent et entretiennent par toute sorte de moyens, ainsi que sur les relations secrètes qu’ils peuvent avoir conservées dans quelques-unes des places frontières. Soutenus par l’or étranger, en mesure pour profiter des événements et à portée d’en saisir l’occasion favorable plutôt qu’en force pour les faire naître, ils inquiètent, menacent, intriguent pour augmenter en nombre et temporisent afin de saisir le moment qui leur sera propice ; voilà leur situation militaire et leur système politique. Il suffit de l’annoncer pour prouver que le nôtre doit être formé en sens inverse.

« Tout délai de notre part entretient l’inquiétude des bons citoyens, refroidit leur zèle, augmente l’espoir des ennemis secrets, occasionne des séditions et prépare à ceux d’Outre-Rhin, cet instant favorable qu’ils guettent. »

Ne nous laissons point éblouir ; nos forces ne seront respectables qu’autant qu’elles seront bien dirigées ; mais si nos ennemis exécutaient leur plan tandis qu’elles seraient en partie employées à réprimer des séditions ; si une quantité considérable de mécontents qui se trouvent dans l’intérieur se joignaient à l’armée ennemie ; si les alarmes et le désordre paralysaient une partie de nos moyens ; si l’incertitude des points d’attaque avait fait prendre le change à nos généraux, si la marche rapide de l’armée ennemie avait produit de la consternation dans les âmes faibles et rendu les patriotes de circonstance à leur premier caractère ; si dans cet instant il existait de la mésintelligence entre les deux pouvoirs ; si dans Paris même, à l’approche de l’armée ennemie, il se trouvait des traîtres soudoyés par l’étranger, quelle serait notre position ?

« Permettez, Messieurs, que je cite un exemple récent. Proscrit en Hollande et sur le point d’y périr sur l’échafaud pour la cause de la liberté, j’ai vu cette cause sublime perdue en temporisations. C’est pour avoir employé des demi-moyens ; c’est pour n’avoir pas écrasé ses adversaires, lorsqu’il en était temps, c’est pour s’être attachée aux effets sans s’attaquer aux causes ; c’est pour avoir attendu jusqu’à ce que ses ennemis furent soutenus par une des puissances de premier ordre, que la Hollande est dans les chaînes.