Page:Jaurès - Histoire socialiste, III.djvu/238

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prises contre les prêtres insermentés, ou par la vacance des curés et desservants, et par toute autre cause que ce soit, il n’y a aucun ecclésiastique chargé de remplir ou d’exercer légalement les fonctions publiques, les municipalités sont autorisées et seront au surplus tenues de faire constater par le maire ou l’un des officiers municipaux, sur les registres tenus à cet effet par les curés et desservants, les naissances, mariages et décès des citoyens de leurs communautés, lesquels actes seront ensuite relatés sur le registre des délibérations du Conseil municipal. En conséquence, il est enjoint aux pères, mères, parrains, marraines et matrones des nouveaux nés, aux époux et épouses aussitôt leurs mariages et aux parents des personnes décédées qui seront appelées ou assisteront aux décès, de faire à leur municipalité respective la déclaration nécessaire pour l’exécution du présent arrêté. »

Mais quelle incertitude et quel désordre si la loi n’était intervenue sans retard ! On devine que cette amputation de la puissance cléricale ne fut pas très agréable, même aux curés constitutionnels. Ils ne pouvaient pourtant s’y opposer sans manquer à la plus élémentaire logique. Ils avaient juré fidélité à une Constitution qui reconnaissait les mêmes droits et assurait les mêmes garanties à tous les citoyens sans distinction de croyance et de culte. Bien mieux, eux-mêmes procédaient d’un acte civil. Ils étaient nommés par la souveraineté populaire dans les mêmes conditions que les autres magistrats. Je suis porté à croire que la Constitution civile du clergé, si décriée par ceux que blesse tout compromis, avait préparé les esprits à accepter l’affranchissement révolutionnaire des actes de la vie.

L’évêque constitutionnel de Paris, Gobel, donna à son clergé, et, indirectement à tout le clergé, des instructions conciliantes et nettement conformes à l’esprit de la nouvelle loi. Il se préoccupa bien d’instituer des registres d’ordre purement confessionnel où seraient mentionnés pour chaque citoyen les actes religieux correspondant aux divers actes de la vie civile, baptême, consécration religieuse du mariage, sépulture chrétienne. Mais il ordonna au clergé, dans une instruction du 31 décembre, de ne rien faire qui pût mettre en échec la loi sur l’état civil ou qui permît de la tourner. Il y déclare, au nom du Conseil épiscopal et métropolitain de Paris, « qu’obligés, autant comme citoyens que comme ecclésiastiques, d’observer et de faire observer, autant qu’il est en eux, les lois de la République, les pasteurs ne doivent se permettre de baptiser, ni de marier, ni d’enterrer, qu’ils ne se soient assurés auparavant que les formalités civiles prescrites par la loi du 20 septembre dernier auront été ou seront remplies ; que c’est là la première question qu’ils devront faire aux fidèles qui se présenteront à eux pour ces divers objets et qu’il est à propos que cette question soit insérée au plus tôt parmi celles qui se trouvent à ces différents articles dans nos rituels ».

Pourtant, une sorte de réserve bien discrète se marquait à la fin du document. Il priait « les citoyens curés et desservants, de faire passer le plus tôt