Page:Jaurès - Histoire socialiste, III.djvu/278

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

toffes de soie, bien loin de vous amener à des vues grandes, à des résultats d’une exécution facile et prompte, ne vous ont offert que des calculs et des combinaisons dictés par un intérêt particulier… Cependant le temps passe, le mal augmente et 24.000 individus attendent que vous leur procuriez du travail et du pain. »

Et Nivière-Chol ne trouve qu’une solution ; c’est que l’État subventionne les fabriques pour les remettre en activité : « Pour des besoins si grands il faut de grandes ressources, la nation seule peut les offrir, parce que sans un secours prompt et extraordinaire, par lequel on puisse redonner de l’activité aux manufactures de Lyon, les maux qui résulteraient de cette inaction prolongée seraient incalculables ; ils troubleraient non seulement la ville de Lyon, mais ils porteraient encore le désordre dans les départements qui avoisinent cette grande cité. »

Il concluait donc à proposer à la Convention, par l’intermédiaire de ses commissaires, ceci :

« 1o Qu’il soit mis à la disposition du ministre de l’intérieur une somme de 3 millions ;

« 2o Que cette somme, destinée à remettre en activité les fabriques de la ville de Lyon, soit successivement adressée par le ministre de l’intérieur au directoire du département, pour être versée dans la caisse du trésorier du district ;

« 3o Que l’emploi en sera fait par un comité choisi par le conseil général de la commune, pris parmi les officiers municipaux et notables au nombre de cinq, présidé par le maire et en présence du procureur de la commune… ;

«… 6o Si, pour donner de l’activité aux fabriques de soies le Comité juge convenable de faire fabriquer des étoffes pour le compte de la nation, il y sera autorisé sous réserve de donner la connaissance et le détail de ses opérations au ministre de l’intérieur. »

Les commissaires transmirent cet arrêté de la Commune à la Convention, mais comme par acquit de conscience et sans insister. Leur attention, à ce moment, était ailleurs ; ils relevaient les fraudes énormes commises à Lyon dans le service administratif des armées. Et sans doute ils jugèrent chimérique la solution proposée par la municipalité lyonnaise ; car quel emploi la nation aurait-elle fait des soieries fabriquées par elle ? Elle avait besoin maintenant de fer pour armer ses soldats et de gros drap pour les vêtir, non de fines et éclatantes étoffes. La Convention laissa tomber cette pétition. Qu’advint-il de la crise industrielle lyonnaise ? Sans doute elle ne s’aggrava pas, car dans son rapport du 9 janvier, Roland n’y fait pas la moindre allusion. M. Thomas, qui étudie le mouvement économique et social sous Louis-Philippe, m’a communiqué de curieuses notes, d’où il résulte que les ouvriers de Lyon se rappelaient la Révolution comme une époque de bien-être. « Les