nements s’expliquent sans difficulté. Je ne suis plus surpris de voir la France si souvent agitée par la crainte de manquer de subsistances ; quand elle aurait quelque chose en sus de ses besoins, les moindres circonstances feraient naître cette crainte, au milieu d’une population aussi forte que la nôtre. »
Mais il conclut :
« Nous avons des grains à peu près ce qu’il nous en faut. »
Creuzé-Latouche déclare, le 8 décembre :
« Je ne crains pas d’affirmer que jamais la France n’eut autant de grains qu’elle en possède actuellement… Depuis trois ans, les récoltes ont été bonnes, et la dernière a été supérieure…
Ajoutez à cette quantité de blés de la dernière récolte, et même des années précédentes (car il y en a, surtout dans les départements du Nord), les blés que l’on doit encore tirer de l’étranger, et vous verrez que le peuple français est réellement au sein de l’abondance, quoiqu’il n’en jouisse pas. »
Louis Portiez, député de l’Oise, écrit le 8 décembre :
« Citoyens législateurs, la saison de la récolte expirait à peine, et déjà on criait à la famine. Les greniers regorgent encore de grains, et on nous menace de la disette…
« Avant 1789, le sol de la France produisait une récolte plus que suffisante aux besoins de ses habitants ; il se faisait alors des exportations à l’étranger ; le gibier avait le privilège de dévaster impunément nos champs et de prélever aussi, chaque année, la dîme au moins de nos productions territoriales. Aujourd’hui que son règne n’est plus, que l’exportation à l’étranger est prohibée, que la masse des subsistances est augmentée de plus de 2 millions de quintaux, tant en grains qu’en farine, importés de l’étranger depuis le 1er janvier de cette année jusqu’à présent, les calculateurs recherchent, en vain, les causes de cette disette factice au milieu de l’abondance. »
Tous les journaux font les mêmes constatations. Dans un important article (24 novembre-1er décembre 1792) sur les subsistances, le journal les Révolutions de Paris dit :
« La récolte a été abondante, cette année ; l’année précédente même avait produit assez de blé pour toute la France. »
Condorcet, de même, note tous les témoignages qui établissent qu’il n’y a pas rareté de grains. Brissot, obsédé par la polémique contre Robespierre et Marat, attribue aux « seuls agitateurs » la cherté du grain.
Mais voici, après tous ces témoignages généraux si décisifs par leur concordance, quelques indications particulières très intéressantes. Laurent Lecointre, député de Seine-et-Oise, soumet à la Convention, au printemps de 1793, un important travail où je relèverai un peu plus tard des éléments précieux pour la question des salaires. Il voulait démontrer à la Convention qu’elle pouvait et devait taxer le blé, et que les fermiers pourraient aisément supporter cette taxe, parce qu’ils avaient de larges revenus. Pour le prouver,