Page:Jaurès - Histoire socialiste, III.djvu/762

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n’étaient pas assez larges et assez hautes, et ils ne comprirent pas que l’inviolabilité des principes est le palladium de la vertu et de la liberté.

« Les membres de cette secte ne forment pas d’ailleurs la majorité de leur parti : mais la minorité aristocratique, appliquée à tout ce qui peut déshonorer ou embarrasser l’Assemblée, se coalisa violemment avec eux, et souilla la Constitution naissante de cette absurde usurpation.

« Un antagoniste éclairé et raisonnable de M. Burke, a tenté la défense de cette mesure. Dans une lettre au comte Stanhope, il est dit que l’esprit de cette loi s’accorde exactement avec les principes de la justice naturelle, parce que, même dans l’état de nature, le pauvre n’a droit qu’à la charité, et que celui qui ne produit rien n’a pas le droit de participer à l’administration de ce qui est produit par l’industrie des autres. Mais, quelque juste qu’il puisse être de disqualifier du droit politique les pauvres improductifs, l’argument, en fait, est appliqué à faux. Les serviteurs domestiques sont exclus par le décret de l’Assemblée, quoiqu’ils subsistent aussi évidemment de leur propre travail que n’importe quelle autre classe de la société : et à ceux-là, par conséquent, l’argument de notre subtil et ingénieux écrivain est tout à fait inapplicable. Mais c’est la consolation des amis conséquents de la liberté, que cet abus sera nécessairement de courte durée. L’esprit de raison et de liberté qui a remporté tant de grandes victoires, ne peut pas être longtemps tenu en échec par ce chétif ennemi. Le nombre des électeurs primaires est si grand, et l’importance de chaque vote individuel est si faible proportionnellement, que leur intérêt à résister à l’extension du droit de suffrage est petit jusqu’à l’insignifiance. »

Chose curieuse ! c’est l’écrivain anglais qui reproche aux législateurs français un défaut d’idéalisme. Il insiste pour l’application absolue et intransigeante des principes. Ainsi, malgré les différences ethniques et historiques, l’idée de démocratie, qui éclate en France, rayonne sur les nations.

Que la pleine souveraineté nationale soit introduite en Angleterre, et bien des abus seront déracinés.

« Les admirateurs de la Révolution française font naturellement appel à tous les citoyens opprimés et éclairés pour qu’ils considèrent la source de l’oppression.

« Si des lois pénales sont encore suspendues sur la tête de nos frères catholiques, si l’acte du test outrage nos concitoyens protestants, si les restes de la tyrannie féodale sont encore tolérés en Écosse, si la presse est enchaînée, si notre droit à être jugés par le jury est amoindri, si nos manufacturiers sont proscrits et traqués par l’excise, la raison de toutes ces oppressions est la même. Aucune branche de la législature ne représente le peuple. Laissez toutes ces classes de citoyens opprimés fondre leurs griefs locaux et partiels en une grande masse. Permettez qu’ils cessent d’implorer leurs droits en suppliants ou de les solliciter en mendiants, comme une faveur précaire de l’ar-