Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/314

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« Nous avons commencé la contre-révolution quinze jours trop tôt ; nous attendions des Anglais et des émigrés qui devaient débarquer aux Sables-d’Olonne. »

C’est dans l’espoir d’ouvrir la France aux Anglais que Joly, avec ses bandes, livra à la vaillante petite ville des Sables-d’Olonne, si héroïquement dévouée à la Révolution, des assauts répétés. Après l’échec de ces premières tentatives, aux premiers jours d’avril « les commandants des armées catholiques royales des Bas-Anjou et Poitou députaient vers Messieurs du comité de Noirmoutier, René-Augustin Guerry, président du comité de Tiflanges », afin de se procurer « d’Espagne ou d’Angleterre la poudre qui leur manquait, si Messieurs de Noirmoutier ne pouvaient leur en procurer suffisamment ». Et M. Chassin ajoute :

« À cette commission, datée de Saint-Fulgent, le 6 avril 1793, les commandants d’Elbée, Berrard et Sapinaud joignirent, le 8, deux billets à remettre aux chefs militaires de l’un des ports d’Angleterre et d’Espagne où leur émissaire aborderait « les priant de leur procurer, dans le plus court délai, des munitions de guerre et des troupes de ligne, pour parvenir aux fins qu’ils se proposaient. »

Il est vrai que l’Angleterre ne se rendit pas compte d’abord de l’importance du mouvement et de l’aide qu’elle y pouvait trouver. Pendant plusieurs mois, les puissances étrangères ne connaissent que le nom d’un des chefs bretons, le perruquier Gaston. Les princes aussi, le comte de Provence et le comte d’Artois, méconnaissent d’abord le mouvement de Vendée. Pressé de rejoindre ceux qui combattaient pour lui, le comte d’Artois se dérobe. Catherine de Russie a beau lui dire : « Vous êtes un des plus grands princes de l’Europe, mais il faut oublier cela et être un bon et valeureux partisan. » Elle a beau lui offrir, en présence de toute sa cour, une épée portant sur la lame cette inscription : « Donnée par Dieu pour le roi », le comte d’Artois hésite à se jeter dans les aventures. Il évita la Vendée.

De quels égoïsmes monstrueux les paysans étaient enveloppés ! On les avait si bien affolés de fanatisme, de pieuses supercheries et de mensonges, qu’on les jetait à la plus terrible lutte dans l’intérêt de prétendants qui, eux, se ménageaient, et qu’on ne craignait pas de leur proposer comme but la restauration de tout l’ancien régime et des privilèges mêmes dont ils avaient le plus souffert. C’était le rétablissement de la dîme. C’était la reconstitution du domaine d’Église repris sur les paysans aussi bien que sur les bourgeois. Le conseil supérieur de Châtillon-sur-Sèvre ne tardera pas, en effet, à « annuler les ventes des biens ecclésiastiques, domaniaux et autres, dits biens nationaux, faites en vertu des décrets des soi-disant assemblées nationales », ainsi que « les cessions et reventes desdits biens consenties par les premiers acquéreurs. » Il déclarera « qu’il n’appartient qu’au Roi, à l’Église et aux ordres de l’État réunis de prononcer sur la dîme ». Les abonnements de dîmes et au-