Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/440

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neurs des sections dans l’exécution des projets qu’ils méditaient depuis longtemps. Déjà, celles-ci s’étaient déclarées permanentes, et cette permanence est telle qu’elles n’interrompent leurs séances ni le jour ni la nuit. Une foule de gens suspects ou malveillants, que la contenance ferme des bons citoyens qui les fréquentaient avaient écartés, y reparut. Plusieurs des ci-devant privilégiés, de ceux qui avaient été désarmés, y occupent aujourd’hui la tribune. Les membres de la Société populaire y sont mal accueillis, ou en sont chassés ignominieusement. Elles se sont déclarées souveraines, et c’est le titre qu’elles prennent publiquement et dans les actes qui émanent d’elles. Nous vous envoyons copie de l’un d’eux. Elles commandent aux autorités constituées qu’elles tiennent asservies. Elles obsédaient continuellement et le jour et la nuit nos prédécesseurs, qui vous en justifieront, par nombre de pétitions dont ils sont porteurs. Elles ont même poussé l’égarement vis-à-vis d’eux jusqu’à user de violence pour avoir communication de leur correspondance. Le secret de leurs lettres et de celles qui arrivaient à leur adresse a été violé. On a lu publiquement quelques-unes de ces dernières qui n’ont point été remises à nos collègues. Plusieurs personnes dignes de foi nous ont assuré qu’au moment où ils ont cru devoir quitter la ville, leur sûreté était compromise et leur vie menacée.

« Un tribunal populaire a été formé par la seule autorité des sections, et, quoique cassé par les commissaires de la Convention et ayant en conséquence cru devoir cesser ses fonctions, il a été réinstallé par la municipalité en écharpe, et avec le concours des sections. Il est maintenant en plein exercice, et rend journellement des jugements, dont trois à mort ont été exécutés hier jeudi avec appareil.

« Les sections ont envoyé 30 commissaires à la Convention. Nous les avons rencontrés en route. Nous ne connaissons pas précisément l’objet de leur mission. Elles en font voyager dans toute l’étendue du département et même dans les départements voisins pour former, avec les communes environnantes, une association qui n’a pas été vue du même œil partout. À Aix, la députation a été accueillie avec enthousiasme, et le même esprit, qui dirige aujourd’hui Marseille, gouverne l’ancienne capitale de la ci-devant Provence. On nous assura hier en route qu’elles avaient le dessein de nous mettre en état d’arrestation nous-mêmes, si nous passions par Marseille. On nous a également assuré que notre collègue Grégoire y avait été insulté à son passage.

« Nous avons été témoins par nous-mêmes, à Aix, de cet esprit des sections, y étant arrivés mercredi sur les trois heures de l’après-midi. L’un de nous, Pierre Bayle, rencontra, comme nous parcourions la ville, quelques personnes qu’il assure avoir toujours connues pour bons patriotes. L’un est officier municipal, et l’autre procureur syndic du district. Nous nous arrêtons quelques instants à causer avec eux publiquement. Il n’en fallut pas davantage pour mettre les sections en mouvement. Sur le soir, une députation très