Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/588

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sonnes qui ont donné lieu au mouvement contre-révolutionnaire de ces derniers temps. »

Comme pour ouvrir la voie à la Convention et l’entraîner par la force du fait accompli, le comité révolutionnaire ordonne dans la nuit qu’on arrête Roland ; il n’était point à son domicile. Mais le matin, vers sept heures, Mme Roland est arrêtée et conduite à l’Abbaye. C’était signifier à la Convention que, si elle ne procédait pas en bloc à l’arrestation des Girondins dénoncés, la révolution parisienne saurait mettre la main sur eux. Le comité préparait, dès le matin du 1er juin, un appel aux quarante-huit sections, appel encourageant et habile, qui prenait acte de tous les résultats obtenus la veille et affirmait la volonté d’aller jusqu’au bout :

« Citoyens, vous étiez sur les bords de l’abîme, entourés d’ennemis puissants au dehors et de conspirateurs audacieux au dedans. C’en était fait de la liberté si vous ne vous fussiez levés. Une conjuration ourdie au sein de la Convention menaçait les plus fermes patriotes et les magistrats les plus chéris du peuple. Dans ce danger, les commissaires que vous avez investis de vos pouvoirs et de votre confiance, voulant sauver la patrie, se sont hâtés de prendre les mesures extraordinaires que commandait l’intérêt de la liberté. Ils ont assuré la fidélité de la correspondance publique. Ils ont porté à vos délégués vos justes plaintes, vos réclamations pressantes, et demandé la punition des traîtres que la Convention recèle dans son sein. Ils ont ordonné l’arrestation de tous les gens suspects qui se cachent dans les sections de Paris. Cette arrestation s’effectue en ce moment de toutes parts.

« Vos commissaires ont en outre concerté le projet de formation d’une armée révolutionnaire de vingt mille hommes pour garder et défendre Paris. Cette armée sera entretenue par une contribution prise sur les riches, et principalement sur ceux reconnus pour leur incivisme.

« Déjà nous avons obtenu un premier succès : la Convention a cassé la Commission inquisitoriale des Douze, et renvoyé à l’examen d’un comité l’examen de la conduite coupable de ses membres. Un autre décret confirme l’arrêté de la Commune qui accorde quarante sous par jour aux ouvriers qui seront requis de prendre les armes dans ces jours de crise… Enfin, la Convention a déclaré que les sections ont bien mérité de la patrie. Par ce qu’elle a fait hier, nous attendons ce qu’elle va faire aujourd’hui. Citoyens, restez debout, les dangers de la patrie vous en font une loi. »

Cet appel fut jugé trop modéré, et ajourné. C’est une action immédiate et forte que voulait l’Évêché.

Le plan du comité révolutionnaire était de revenir à la charge le jour même, de peser de nouveau sur la Convention ; les autorités constituées lui soumettraient une pétition énergique demandant l’arrestation et la mise en jugement des chefs girondins, et la Convention, lassée, vaincue par cette insistance du peuple, céderait, sans qu’il y eût une goutte de sang versé. Aussi