en pratique. Mais tout peuple éclairé sera libre quand il le voudra. Je dis plus : les lumières amèneront nécessairement la liberté, parce qu’elles font connaître les droits de chacun, droits que l’ignorance dans laquelle on voudrait vous replonger, avec les principes que l’on débite parfois à cette tribune, ne fait ni soupçonner, ni découvrir, ni recouvrer.
« Je l’avouerai, les premières assertions de Durand-Maillane m’ont paru fort étranges, lorsqu’il a voulu circonscrire dans certaines limites la raison de l’homme, qui n’en connaît plus ; ou donner, à l’exemple des despotes, telle direction plutôt que telle autre à la pensée et à la main de l’homme, tandis que, sous le régime républicain, la pensée et la main de l’homme prennent toutes tes directions et toutes les formes possibles en agrandissant son domaine. »
Jacob Dupont confond ainsi la liberté et la vertu. Non seulement les lumières ne corrompent pas les mœurs, mais en suscitant la liberté, elles suscitent la vertu elle-même. Toute vertu n’est-elle pas contenue dans la dignité de l’homme et dans le sentiment qu’il en a ? La science qui développe la liberté de l’homme dans le monde social développe sa puissance dans le monde naturel. Elle est donc la puissance complète, elle est la grande libératrice qui fait tomber toutes les chaînes, la chaîne des fatalités naturelles, la chaîne des iniquités sociales. Ce n’est ni un aristocratique idéal de curiosité vaine, ni un ascétique idéal d’égalité pauvre que la Révolution propose aux hommes, mais l’idéal radieux et fort de la liberté et de la joie : indépendance de l’homme à l’égard de l’homme, maîtrise croissante de l’homme sur la nature et les choses ; des hommes affranchis de toute oppression humaine, et venant puiser à une source toujours accrue de puissance, de richesse et de bonheur. Et quelle magnifique conciliation de la philosophie et de l’action ! C’est le Dix-Août qui justifie les philosophes du XVIIIe siècle, l’insurrection populaire pour la République et la liberté qui atteste que les savants et les penseurs n’ont pas perdu leur peine. C’est l’Encyclopédie qui a ouvert aux murs du château royal la brèche par où le peuple est passé. La haute science, la haute pensée, qu’on affecte parfois de dédaigner comme stériles, parce qu’on les redoute comme révolutionnaires, font ainsi éclater leur puissance dans le progrès des institutions, elles la font éclater aussi dans le progrès des applications techniques :
« Qu’elles sont petites, qu’elles sont bornées les vues de Durand-Maillane ! Il m’a semblé, encore une fois, entendre un homme du XIVe siècle, lorsqu’il a posé cette question : Convient-il, dans une république, de donner la préférence aux sciences plutôt qu’aux arts mécaniques ? comme si le comité d’instruction avait cherché à établir une préférence ou comme s’il pouvait l’établir !
« Durand-Maillane ignore donc que tout se tient dans la nature ; que la construction des vaisseaux, pour prendre un seul exemple, tient à tout ce