« Je ne crois point encore, avec et comme toi, impolitique et superflu d’évoquer les cendres et les principes de Robespierre et de Saint-Just pour étayer notre doctrine. D’abord, nous ne faisons que rendre hommage à une grande vérité, sans laquelle nous serions trop au-dessous d’une équitable modestie. Cette vérité est que nous ne sommes que les seconds Gracques de la Révolution française. N’est-il pas utile de montrer que nous n’innovons rien, que nous ne faisons que succéder à des premiers généreux défenseurs du peuple, qui avant nous avaient marqué le même but de justice et de bonheur auquel le peuple doit atteindre ? Et en second lieu, réveiller Robespierre, c’est réveiller tous les patriotes énergiques de la République et avec eux le peuple qui, autrefois, n’écoutait et ne suivait qu’eux. Rendons à sa mémoire son tribut légitime ; tous ses disciples se relèvent et bientôt ils triomphent. Le robespierrisme atterre de nouveau toutes les factions. Le robespierrisme ne ressemble à aucune d’elles ; il n’est ni factice ni limité. Le robespierrisme est dans toute la République, dans toute la classe judicieuse et clairvoyante et naturellement dans le peuple. La raison en est simple : c’est que le robespierrisme, c’est la démocratie, et ces deux mots sont parfaitement identiques. Donc en relevant le robespierrisme, vous êtes sûrs de relever la démocratie. »
Cette lutte pour la démocratie, contre le sectarisme naissant de l’hébertisme et de la Commune, qui donc, sinon Robespierre, pouvait la mener ? Ce n’était point Marat ; il était à bout de forces ; et son regard aigu ne pouvait plus surveiller tout l’horizon. Contre Jacques Roux et les Enragés il aidait Robespierre : j’ai déjà fait allusion à son terrible article du 4 juillet (article calomnieux). Il y dénonce « les faux patriotes plus dangereux que les aristocrates et les royalistes. » Il y fait le portrait de Jacques Roux, « boutefeu de la section des Gravilliers et de la société des Cordeliers, chassé de ces assemblées populaires, de même que ses confrères Varlet et Leclerc ses complices ». Oui, « le plus cruel des fléaux que nous ayons à combattre pour faire triompher la liberté, ce n’est point les aristocrates, les royalistes, les contre-révolutionnaires, mais les faux patriotes exaltés, qui se prévalent de leur masque de civisme pour égarer les bons citoyens, et les jeter dans des démarches violentes, hasardées, téméraires et désastreuses. Ces intrigants ne se contentent pas d’être les factotums de leurs sections respectives, ils s’agitent, pour s’introduire dans toutes les sociétés populaires, les influencer et en devenir enfin les grands faiseurs. Tels sont les trois individus bruyants qui s’étaient emparés de la section des Gravilliers, de la Société fraternelle et de celle des Cordeliers, je veux parler du petit Leclerc, de Varlet et de l’abbé Renaudi, soi-disant Jacques Roux. »
Mais ce n’est là qu’une boutade.
Marat n’avait pas l’étendue de vues et il ne pouvait plus avoir la constance d’action de Robespierre. Au demeurant, il était si préoccupé de l’épuration nécessaire des états majors militaires, il menait contre Biron, com-