hongroise. Sur la proposition de Cavaignac, l’Assemblée invitait bien le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour protéger tant l’avenir de la liberté que les intérêts extérieurs de la République ; mais elle repoussait cette addition : Pour sauvegarder l’indépendance et la liberté des peuples. — La politique de rayonnement républicain et de sympathie active pour les populations opprimées était définitivement condamnée.
La fin de la Constituante est ainsi agitée de discussions violentes qui sentent la poudre. Elle passe ses derniers jours en interpellations perpétuelles : Banquets et réunions électorales troublés par l’intrusion de la police : pierres et coups de bayonnettes lancés dans le cabriolet de Ledru-Rollin, qui est allé faire à Moulins un discours de propagande ; rafles policières opérées à Paris et où sont enveloppés plusieurs représentants ; manœuvres de la dernière heure destinées à influencer les électeurs et dont la plus éhontée fut celle du ministre de l’intérieur, Léon Faucher. Le 12 mai, veille du scrutin, il avait envoyé à tous les préfets une dépêche télégraphique relative au vote de la Chambre sur la proposition Jules Favre ; elle se terminait ainsi : « Le vote consolide la paix publique. Les agitateurs n’attendaient plus qu’un vote hostile de l’Assemblée pour courir aux barricades et renouveler les journées de Juin. » Le ministre avait fait de plus afficher dans chaque département, non sans erreurs, la liste des représentants qui avaient vote contre le gouvernement. Léon Faucher agissait avec l’audace de l’homme qui compte sur le succès pour amnistier tous ses abus de pouvoir. Mais, il avait dépassé la mesure et cela en un moment où ses services devenaient inutiles. Il fut sacrifié, défendu à peine par cinq fidèles, dont le pasteur Coquerel.
Les élections se firent de la sorte, d’une part sous l’influence d’une peur savamment entretenue et d’une pression gouvernementale intense, de l’autre sous le coup d’une exaspération qui répondait à ces procédés. Le choléra, qui faisait chaque jour des victimes par milliers, n’atténua guère les passions surexcitées. Les premiers résultats connus — ceux des grandes villes — ayant été favorables aux rouges, le maréchal Bugeaud parlait de marcher sur Paris. Il aimait à dire que l’armée est la sauvegarde des nations. C’est dans cet effacement de l’élément civil devant l’élément militaire que la Constituante termine lamentablement sa vie courte, tumultueuse et très remplie. Le sang-froid et l’expérience lui manquèrent plus que les talents et la bonne volonté. En conflit dès le début avec le peuple de Paris, impuissante et désorientée en face du problème social brusquement posé par une crise prolongée, enveloppée dans les horreurs de la guerre civile, elle en conçut un effarement qui domina et fît dévier toute son activité. Epouvantée des transformations que le socialisme voulait apporter au système bourgeois, elle se laissa diriger, quoique républicaine d’intention, par les monarchistes et des catholiques très habiles qui l’entraînèrent sur la voie de la réaction beaucoup plus loin qu’elle ne