Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/176

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vier 1798). On songea à diverses reprises dans la période qui nous occupe (voir notamment dans le Moniteur du 2 vendémiaire an VII-23 septembre 1798 la circulaire du ministre de l’Intérieur du 15 fructidor an VI-1er septembre 1798) à procéder à un recensement. Mais cette opération que la loi du 10 vendémiaire an IV (2 octobre 1795) sur l’organisation du ministère avait mise dans les attributions de ce ministre, ne devait sérieusement avoir lieu qu’en 1801. D’après le tableau admis le 5 pluviôse an V (24 janvier 1797), à propos des élections législatives, il y aurait eu, pour le territoire de la France continentale actuelle, 27 millions et demi d’habitants, chiffre peut-être un peu exagéré.

Sur cette population, combien y avait-il de citoyens ayant le droit de vote, en 1795, avant la Constitution de l’an III, et sous cette Constitution, c’est-à-dire en régime de suffrage universel et en régime censitaire ? J’aurais voulu répondre à cette question pour la France entière ; je ne puis le faire que pour le département de la Seine. C’est le suffrage universel qui a été appelé à se prononcer sur la Constitution de l’an III et à nommer, en vendémiaire an IV (octobre 1795), les électeurs du second degré ; une pièce des Archives nationales (C 482) mentionne le chiffre de ceux qui avaient le droit de participer aux assemblées primaires des 48 sections de Paris et des 16 cantons de la banlieue, formant le département de Paris que l’art. 3 de cette Constitution débaptisait pour l’appeler département de la Seine. L’addition de ces chiffres donne 169 788 inscrits pour Paris et 20 138 pour la banlieue, soit en tout, pour le département, 189 216 inscrits correspondant à 898 électeurs du second degré. Or, le même document dit ailleurs que ces derniers étaient au nombre de 917, « lequel nombre de 917 a été reconnu ne pas excéder celui d’un à raison de 200 » ; si on multiplie 917 par 200, on trouve 183 400 au lieu de 189 216. Prenons le chiffre le plus faible et nous voyons qu’il y avait, en régime de suffrage universel, 183 400 électeurs inscrits dans le département de la Seine dont la population totale, d’après le tableau de l’an V cité tout à l’heure, montait à 738 522 habitants. Un second document des Archives, imprimé celui-là (F1c Seine 1), nous indique le chiffre des électeurs « ayant droit de voter » dans les assemblées primaires des 12 arrondissements de Paris et des 16 cantons de la banlieue, pour l’élection, en l’an VII, dernière élection faite sous le régime censitaire de la Constitution de l’an III, de 670 électeurs du second degré dont 595 à Paris et 75 dans la banlieue. L’addition donne 121 355 pour Paris et 15 665 pour la banlieue, soit en tout 137 020, ce qui représente le chiffre de 183 400 diminué d’un quart. D’autre part, ce chiffre de 183 400 est très approximativement le quart de la population totale du département ; en supposant que cette proportion ait été partout la même, on obtiendrait, pour le territoire de la France continentale actuelle, environ 6 millions et demi d’électeurs inscrits en régime de suffrage universel et à peu près 5 millions sous l’empire de la Constitution de l’an III à ses débuts ;