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CHAPITRE XII

LES DÉBUTS DU DIRECTOIRE

(Brumaire à germinal an IV-octobre l790 à mars 1796.)

La Convention, on l’a vu (chap. x), avait décidé que les deux tiers du nouveau Corps législatif (Conseil des Anciens et Conseil des Cinq-Cents), seraient pris parmi ses membres ; 379 seulement ayant été élus, ceux-ci, le 4 brumaire (26 octobre), conformément au décret du 13 fructidor, désignèrent les 104 qui, joints aux 17 des colonies conservés provisoirement, devaient compléter la liste des 500 Conventionnels maintenus en fonction. Parmi les noms de tous ceux d’entre eux qui étaient mariés ou veufs et âgés de plus de quarante ans, le sort désigna le lendemain, en réunion plénière, les 167 appelés à faire partie du Conseil des Anciens, auxquels on ajouta, remplissant les mêmes conditions, 83 noms tirés au sort sur la liste des nouveaux élus. Ceux dont le nom n’était pas sorti dans ces deux tirages et ceux qui étaient célibataires ou âgés de moins de quarante ans devaient former le Conseil des Cinq-Cents. Les deux Assemblées ainsi réparties se réunirent d’abord encore une fois ensemble, puis séparément le 6 brumaire (28 octobre), le Conseil des Anciens aux Tuileries, dans la salle attenant au pavillon de Marsan, que venait de quitter la Convention ; le Conseil des Cinq-Cents, en attendant que le Palais Bourbon fût en état de le recevoir, dans la salle du Manège, située sur l’emplacement de la rue de Rivoli, tout près de la rue de Castiglione — elle devait disparaître en exécution des arrêtés du 17 vendémiaire an X (9 octobre 1801) et du 1er floréal an X (21 avril 1802) relatifs au percement de ces deux rues — et où avaient siégé la Constituante depuis le 9 novembre 1789, la Législative et la Convention jusqu’au 9 mai 1793 (A. Brette, Histoire des édifices où ont siégé les Assemblées de la Révolution, t. Ier, p. 124, 145, 272, 274, 275 et 292). Les présidents devaient être changés tous les mois ; les premiers élus furent La Revellière-Lépeaux pour les Anciens, Daunou pour les Cinq-Cents ; ils représentaient, comme la majorité des deux Conseils, la politique des Girondins, réintégrés après Thermidor ; dans les deux, la minorité était surtout composée de royalistes honteux. En outre des règles posées dans une soixantaine d’articles de la Constitution (art. 44 à 109), la Convention avait voté, le 28 fructidor an III (14 septembre 1795), une loi relative au mode des délibérations et à la police du Corps législatif, qui fut appliquée pendant toute la durée du Directoire ; cette loi avait surtout pour but et eut pour résultat d’empêcher, dans la salle des séances, le groupement des partis en droite, centre, gauche, et, par suite, de supprimer la possibilité de se concerter, d’arrêter une tactique commune pour les cas imprévus, si fréquents