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Babeuf — concernant la partie du dossier qui a été nécessairement vue, et il en est d’autres prouvant que toute la partie du dossier que je vais résumer a été ignorée

S’il y a eu, il y a cinquante ans, au greffe de la Cour d’Amiens, un dossier Babeuf, ce dossier ne s’y trouve plus, ainsi qu’a bien voulu m’en informer, par lettre du 20 janvier 1904, le greffier en chef, qui n’a « pas même l’arrêt du tribunal criminel d’Amiens du 23 août 1703 ». Mais contrairement à ce qui est supposé dans cette lettre, le dossier de Beauvais ne peut être celui qui, d’après M. Granier de Gassagnac, était, il y a cinquante ans, à Amiens, puisque, suivant une lettre qui est aux Archives nationales et dont je parlerai plus loin, ce dossier, après être allé de Laon à Compiègne, alla de Compiègne à Beauvais, où il était le 5 germinal an IV (55 mars 1796) ; c’est après avoir lu cette lettre aux Archives que je me rendis, à la fin d’octobre 1899, au greffe du tribunal de Beauvais où je retrouvai aussitôt le dossier. Quatre mois avant, à la suite de la lecture de l’ouvrage de M. Combier, et après m’être informé de ce qu’étaient devenus les documents de cette époque du tribunal de Compiègne, j’étais allé aux Archives départementales de l’Oise, où ces documents se trouvent en partie ; mes recherches avaient été infructueuses. Quand j’eus lu aux Archives nationales la lettre de Villemontey dont il sera encore question tout à l’heure et qui, semble-t-il, n’a attiré l’attention de personne, c’est à l’obligeance de l’archiviste de l’Oise, M. Roussel, que je dus, en 1899, l’autorisation du président et du procureur de la République de compulser dans le grenier, où elles se couvrent de poussière, les archives du greffe de Beauvais ; et c’est à l’amabilité de M. Vallé, garde des sceaux, que je dois d’avoir, en 1903, pu faire photographier les deux pièces du dossier reproduites au début de ce volume.

J’ai dit (fin du chap. 1er), que le tribunal criminel de l’Aisne avait résolu de communiquer à la commission des administrations civiles, police et tribunaux, qu’à son avis Babeuf ne pouvait pas être poursuivi seul et que devaient être poursuivis avec lui ceux qui avaient participé à l’acte incriminé. Le 16 brumaire an III (6 novembre 1794), cette commission écrivit à l’accusateur public de Laon qu’il lui paraissait, à elle aussi, « que c’était par l’effet d’une omission ou d’un défaut de rédaction que Babeuf seul avait été renvoyé devant lui, et qu’elle transmettait le dossier au commissaire près le tribunal de cassation, ce qu’elle fit par lettre très détaillée contenant l’historique de l’affaire et portant : « La commission considère que l’acte d’accusation à présenter contre Babeuf paraît véritablement devoir envelopper Devillas, Jaudhuin, Debraine et Leclerc ». Le tribunal de cassation ne fut pas du même avis ; le 27 frimaire an III (17 décembre 1794), il décidait qu’il n’y avait pas lieu à traduire de nouveau les acquittés devant la justice, et les pièces étaient renvoyées par la commission des administrations civiles, police et tribunaux à l’accusateur public de Laon (21 nivôse an III-10 janvier 1795). Le 1er plu-