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lendemain. Tandis que Brune remplaçait Ménard, une division de l’armée du Rhin, commandée par le général Schauenbourg, se concentrait dans le Nord aux environs de Bienne occupée le 22 (10 février). Pendant ce temps, les négociations de Mengaud à Berne aboutissaient à un armistice de quinze jours devant expirer le 11 ventôse (1er mars). Le 26 février, avant même d’avoir reçu l’ultimatum du Directoire, le gouvernement bernois se prononçait pour la guerre et le général bernois d’Erlach faisait notifier, le 1er mars, à nos avant-postes de Bienne l’ouverture des hostilités (Ernouf, Nouvelles études sur la Révolution française, année 1798, p. 104). Nos troupes divisées en deux corps dirigés l’un par Brune, l’autre par Schauenbourg, entraient aussitôt en campagne.

Le 12 ventôse (2 mars), Schauenbourg faisait capituler Soleure et Brune enlevait Fribourg. Le colonel Grafenried, de l’armée bernoise, battait inutilement, le 15 (5 mars), deux brigades de Brune à Laupen et à Neuenegg ; car, le même jour, Berne était occupée par Schauenbourg et Brune y arrivait le lendemain matin. On prit au trésor de Berne 7 millions en numéraire et on allait tirer une douzaine de millions aux villes suisses. Une partie de cet argent enrichit les fonctionnaires qui participèrent à ces spoliations et dont l’un, commissaire civil et parent par alliance de Reubell, s’appelait, par une ironie trop symbolique, Rapinat, d’où le quatrain suivant, dû, d’après Barras (Mémoires, t. III, p. 2361. à Alexandre Rousselin de Saint-Albin :

Un bon Suisse que l’on ruine.
Voudrait bien que l’on décidât
Si Rapinat vient de rapine,
Ou rapine de Rapinat.

Je dois ajouter que, d’après une note de la revue la Révolution française (n° du 14 juillet 1903, p. 89), « la plupart des faits reprochés à Rapinat sont le fait de l’ordonnateur Rouhière, etc. ». Rapinat devait succéder, le 14 floréal (3 mai), au commissaire civil Le Carlier.

Nous voyons, par le Moniteur des 24 et 30 pluviôse an VI (12 et 18 février 1798), que, dès les premiers jours de février, le pays de Vaud s’était transformé en « République lémanique » ou « lémane ». Le 26 ventôse (16 mars), un arrêté de Brune convoquait à Lausanne les représentants du Léman (ancien pays de Vaud), du canton de Fribourg, de l’Oberland, du Valais, du Tessin, pour constituer la « République rhodanique » (Moniteur du 9 germinal-29 mars). D’autres cantons, Schaffhouse, Appenzell, Lucerne, Zurich, Berne, Soleure et Bâle étaient, le 29 ventôse (19 mars), convoqués à Aarau pour former une seconde République, la « République helvétique », et les cantons de Schwitz, Uri, Unterwalden, Zug et Glaris étaient provisoirement laissés de côté, peut-être pour une troisième. Mais, à la suite d’une lettre du Directoire du 25 ventôse (15 mars), un arrêté du 2 germinal (22 mars) de Brune décida