Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/516

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les Napolitains, les campagnards insurgés et les vaisseaux anglais, convinrent de rendre, huit jours après, Rome aux Napolitains et les deux autres places aux Anglais ; avec Ancône dont j’ai déjà parlé, c’étaient, en dehors de la région des Alpes, les seules villes d’Italie où les troupes françaises tinssent encore ; les alliés s’engagèrent à transporter, avec armes et bagages, les trois garnisons à Marseille, où elles débarquèrent, en effet, le 5 brumaire (27 octobre), et à ne pas inquiéter les républicains romains, mais ce dernier engagement fut scélératement violé.

Général en chef des armées du Danube et d’Helvétie, Masséna commandait à 100 000 hommes environ. La droite allait de l’Engadine au lac de Constance ; le centre tenait la rive gauche du Rhin, du lac de Constance à Rheinfelden ; la gauche, dont une partie était constituée par l’ancienne armée d’observation, montait de Bâle au delà de Mannheim en un mince cordon ressemblant, suivant le mot de Jomini (t. XI, p. 209), à « une ligne de douaniers ». Par un arrêté du 2 floréal (21 avril) supprimant l’armée d’Helvétie, toutes ces troupes ne formèrent plus qu’une armée dite du Danube.

Si, pendant le mois d’avril, l’armée de l’archiduc Charles resta dans ses cantonnements, immobilisée par les ordres de Vienne où on persistait à la maintenir en Allemagne en attendant les renforts russes, l’armée de Bellegarde marcha, dès le début de ce mois, contre Lecourbe et Dessoles, dont les succès étaient rendus inutiles par la retraite de Jourdan, et qui, n’ayant à compter sur aucun appui, rétrogradèrent devant des forces très supérieures. Ils se rejoignirent à Zernetz, sur la rive droite de l’Inn, à une quarantaine de kilomètres au sud-est de Coire, d’où Dessoles descendit à Tirano ; là, rappelé en Italie, il laissa le commandement de ses troupes au général Loison. Satisfait de ce double recul, Bellegarde employa tout le reste du mois d’avril à combiner avec Hotze une entreprise contre la droite de Masséna et ne se remit en mouvement que le 11 floréal (30 avril).

Lecourbe, tout en luttant avec succès, dut alors se replier sur les sommités de l’Albula, en laissant un fort détachement à Davos. Puis, afin d’arrêter les troupes envoyées par Souvorov pour s’emparer du Saint-Gothard, il se porta sur Bellinzona, tandis que Loison, ayant évacué Tirano le 16 (5 mai), arrivait au Splügen ; il atteignit, le 24 (13 mai), une brigade détachée par Souvorov à Lugano et dont l’avant-garde se trouvait déjà à une quinzaine de kilomètres au nord, au mont Cenere ; le chef de cette brigade était le prince de Rohan, émigré français que le sentiment nationaliste et patriotique, si développé chez les royalistes, avait irrésistiblement poussé à combattre la France à la solde de l’Autriche. Lecourbe le battit complètement, le rejeta au fond de la vallée d’Agno et vint prendre position au Saint-Gothard. Pendant ce temps, le 25 (14 mai), commençait une nouvelle manœuvre combinée de Hotze et de Bellegarde. Le premier, à qui l’archiduc