Page:Jaurès - Histoire socialiste, VI.djvu/537

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de la Seine-Inférieure en a informé le ministre dans plusieurs lettres, dont la dernière annonce que cet état de choses empire tous les jours.

« Les petites fabriques isolées et disséminées dans les campagnes sont, jusqu’à ce jour, les seules qui ont dû succomber ; les ouvriers qu’elles alimentaient trouveront peut-être, dit le préfet, des occupations d’une autre nature. Mais la crise se prolonge, le désastre des grands ateliers de Rouen est également inévitable ; les ouvriers qu’ils occupaient n’auront d’autres ressources que la mendicité et le vagabondage.

« Dans cette position, le préfet a proposé au ministre de supplier Votre Majesté de vouloir bien faire des avances de secours à ceux des fabricants qui seraient en état d’en garantir le remboursement par des sûretés constatées au préalable. Le ministre a de suite invité le préfet à lui désigner les chefs de grands établissements qui pourraient être dans le cas d’avoir recours à la bienveillance de Sa Majesté, et lui a adressé à ce sujet les instructions nécessaires.

« D’un autre côté, le ministre examine en ce moment quelques autres moyens particuliers qui lui ont été proposés pour procurer de suite du travail à la classe indigente de Rouen ; mais, en attendant, il n’a cru devoir différer de mettre sous les yeux de Sa Majesté un aperçu de la situation de la place de Rouen ».

Comme Rouen, Lyon réclame aussi l’intervention gouvernementale pour être sauvée de la misère. Cela ressort d’une pièce intitulée : « Compte rendu des réclamations de la fabrique de Lyon » :

« Je mets sous les yeux de Votre Majesté, dit le ministre, les renseignements qu’elle a demandés sur l’état de la fabrique de Lyon.

« Elle verra que le nombre des métiers de Lyon et de ses faubourgs s’était successivement élevé jusqu’à 14 000 ;

« Que chaque métier fait vivre quatre individus ;

« Que sur les 14 000 métiers, la Chambre de commerce a obtenu des renseignements positifs pour les deux tiers et qu’on ne peut guère juger, du tiers restant que par analogie ;

« Que dans l’état actuel, la moitié des métiers est sans activité et qu’on peut craindre que cette progression de non activité croisse encore.

« Que les commandes manquantes pour cet hiver peuvent être évaluées à 12 000 000 de francs, dont on peut rigoureusement espérer encore la moitié, de sorte que c’est à remplacer l’effet de commandes pour 6 000 000 que se borne en cet instant la demande de la fabrique de Lyon.

« J’aurais désiré un état circonstancié des demandes faites et de celles révoquées ou manquantes, mais les fabricants qui ont apporté le vœu de la