Page:Jaurès - Histoire socialiste, VI.djvu/563

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ce qui est estimé pour chacun 200 francs par an. Leur salaire est de 24 francs par mois ou de 288 francs par an.

Le mémoire de M. Masson Saint-Armand, préfet de l’Eure, contient des renseignements plus intéressants : d’abord en ce qui concerne le travail des enfants.

« L’âge où les enfants commencent à être de quelque utilité, dit-il, varie suivant les localités et le genre d’industrie. Dans les villes manufacturières, un enfant de sept ans travaille déjà la laine, le coton, le fil ; au retour des écoles publiques où il va s’instruire, il retrouve la laine et le coton qu’on lui donne à éplucher, à filer, à dévider, à préparer pour la trame ; il contracte de bonne heure l’habitude du travail et d’une occupation sédentaire. Dans les campagnes, les enfants du même âge, appartenant à des parents indigents, conduisent au pâturage les vaches nourricières de la famille, cueillent les herbes dans les champs, reviennent à la maison soulager la mère des soins qu’elle donne à des enfants plus jeunes.

« Dans les communes riveraines des forêts, qui sont ordinairement très peuplées, les enfants, dès qu’ils peuvent marcher, accompagnent leur père à la loge ou atelier dans lequel il travaille, ils ramassent les copeaux ou les éclats de bois qu’ils apportent à la maison ; devenus plus forts, quand ils commencent à connaître les routes, ils cueillent la bruyère, cherchent le bois sec, font provision de tout ; et, s’ils ne sont éloignés que d’un myriamètre des villes, ils y apportent chaque jour le bois qui excède leur consommation, et s’en retournent gaiement montés sur l’âne paisible qu’ils ont promené dans les différents quartiers pour le débarrasser de son fardeau. Ce genre d’occupation, toujours nécessaire à l’existence de la famille, est un obstacle à l’instruction des enfants ; ils manquent ordinairement des connaissances élémentaires ; lorsqu’ils ne peuvent sortir ou qu’ils sont rentrés, on leur fait filer de la laine. »

Suivent deux tableaux assez curieux qui sont à consulter. Le premier est l’appréciation officielle du budget nécessaire aux citoyens des diverses classes sociales pour leur existence quotidienne.

« Somme nécessaire à chaque individu pour son existence par jour :