raisonneuse et cette logique folle qu’a été soudain, au cours de l’enquête, aggravé le cas de Dreyfus, et décidé son destin.
Pour que cette affaire fût complète, il y fallait la déraison suprême : elle y est.
L’ILLUSION TENANCE
I
Et voici l’illusion tenace qui caractérise l’état spécial de M. Bertillon.
Deux ans après, quand on lui eut fourni la preuve que l’écriture du bordereau était identique à celle d’Esterhazy, quand il l’eut reconnu lui-même, il persista à soutenir que le bordereau n’avait pu être fabriqué que selon son système à lui.
Le colonel Picquart dépose qu’après avoir eu en main des lettres d’Esterhazy, il les a soumises à M. Bertillon :
M. Bertillon, dès que je lui eus présenté la photographie, me dit : C’est l’écriture du bordereau. — Je lui dis : Ne vous pressez pas ; voulez-vous reprendre cet échantillon et l’examiner à loisir ? — Il me répliqua : Non, c’est l’écriture du bordereau ; d’où tenez-vous cela ?
Ainsi, pour M. Bertillon, dès qu’on lui soumet, sans lui dire quelles sont ces pièces, des lettres d’Esterhazy, l’identité entre l’écriture du bordereau et l’écriture de ces lettres a éclaté. Il ne le nie pas devant la cour d’assises.
Voici ses paroles, confirmant celles du colonel Picquart :
En déposant le papier sur la table, je lui ai dit : C’est encore l’affaire Dreyfus ? — Il m’a dit : Oui… enfin, je voudrais