Page:Jaurès - Les Preuves.djvu/171

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 153 —

rait en rien les caractéristiques de l’écriture, la forme spéciale et distincte des lettres et leur liaison.

Il a demandé à M. le général de Pellieux avec une ironie souriante qui a eu raison de la grosse voix du général :

Si le fac-similé du Matin ne ressemble pas au bordereau, par quel prodige cette reproduction ressemble-t-elle à l’écriture de M. Esterhazy ? Ou bien on a publié, sous le nom de bordereau, et avec le même texte, une pièce qui n’est pas le bordereau, et c’est un faux qu’il faut poursuivre : on ne le fait pas.

Ou bien, si la reproduction photographique est loyale, mais maladroite, comment expliquer que cette dénaturation involontaire du bordereau aboutisse précisément à reproduire l’écriture d’Esterhazy ?

Comment se fait-il qu’Esterhazy lui-même ait d’emblée reconnu sa propre écriture, avec effroi, dans le fac-similé du Matin ?

Et le général de Pellieux, ainsi pressé, sent bien qu’il s’est aventuré au delà du vrai. Il rectifie devant le jury (Procès Zola, tome II, page 50), par ces paroles qui coupent court au débat :

M. le général de Pellieux : Pardon, pardon, je n’abandonne rien ; je dis que j’ai reconnu que le fac-similé du Matin avait une grande similitude avec le bordereau, mais qu’il y avait d’autres pièces publiées par les journaux qui, pour moi, ressemblaient à des faux, et je le maintiens.

Mais il ne s’agit pas des autres pièces. Il s’agit du fac-similé du Matin, sur lequel tous les hommes que je viens de citer ont travaillé et, puisque M. le général de Pellieux, serré de près par M. Paul Meyer, a dû convenir qu’il était exact, la question est close.

Mais qu’en pense M. Alphonse Humbert qui, dans les couloirs de la Chambre, décriait les expertises des savants en disant qu’ils avaient travaillé sur des docu-