patriotes ont crié : « C’est dans l’Intérêt de la France qu’on a dû violer la loi ; on a caché à l’accusé les pièces qui décidèrent les juges ! Tant pis ! La France au dessus de tout ! Il ne fallait pas qu’une indiscrétion quelconque pût la compromettre ! »
Et les mêmes hommes acclament M. Cavaignac apportant à la tribune, et livrant à l’univers, les papiers « secrets ! »
Quand donc les « patriotes » cesseront-ils de se moquer de nous ? S’ils veulent subordonner la loi et asservir la France à leurs fantaisies, qu’ils aient du moins quelque suite, et qu’ils ne nous infligent pas l’incohérence dans la servitude !
En tout cas, dès maintenant, et après le discours de M. Cavaignac, il n’est plus permis de dire que l’illégalité est nécessaire ; il n’est même plus permis de dire que le huis clos est nécessaire. Les raisons de prétendu patriotisme dont on couvrait toutes les violences ne tiennent plus ; le tambour dont le roulement couvrait toute discussion, toute parole libre, est crevé.
Il est entendu aujourd’hui que la France peut sans péril juger au grand jour et selon sa loi ; et quand la conscience publique, révoltée enfin contre la monstrueuse iniquité et la monstrueuse erreur de l’affaire Dreyfus, obligera les gouvernants à rouvrir le procès, ce ne sera plus un procès de violence et de ténèbres ; c’est dans la pleine lumière d’un débat public, c’est sous la garantie de la loi, que l’accusé sera jugé de nouveau.
Mais puisque la criminelle illégalité commise contre Dreyfus était à ce point inutile, pourquoi le ministre et les bureaux de la guerre s’y sont ils risqués ? Puisqu’ils communiquaient dans les formes légales le bordereau, puisqu’il n’y avait aucun péril à soumettre aussi à l’accusé,