Page:Jaurès - Les Preuves.djvu/7

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mensonges légaux pour chercher la vérité ? Pourra-t-elle concilier la fonction légale qui lui est assignée par le Code avec la fonction quasi-révolutionnaire que lui assignent les événements ?

Elle est la gardienne de la loi : or, la loi, par une application monstrueuse, a travaillé jusqu’ici, dans toute cette affaire, contre la vérité.

La cour de cassation pourra-t-elle rétablir la vérité sans froisser la loi ? Et comment délogera-t-elle Esterhazy et du Paty des abris légaux que la trahison gouvernementale a ménagés à l’espion et au faussaire ? Voilà la première difficulté.

Il en est une autre. La cour de cassation découvrira certainement, dans son enquête, des vérités terribles. Il est impossible que la longue série des faux produits par les bureaux de la guerre ait pu être fabriquée sans la complicité, ou du moins sans la complaisance des grands chefs. De plus, la forfaiture du général Mercier communiquant aux juges, en violation de la loi, des pièces inconnues de l’accusé et empruntant même ces pièces à un autre dossier que celui de l’affaire Dreyfus est certaine. Sur le général Mercier pèsent donc les responsabilités les plus lourdes.

La cour de cassation aura-t-elle l’énergie d’attaquer les grands chefs, les grands coupables ? Et sachant que pour eux la lumière serait mortelle osera-t-elle faire toute la lumière ?