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ENTRE AVEUGLES

soit, ce qui est mieux, qu’on ait appris à aller jusqu’à la boîte aux lettres la plus voisine.

La réception des lettres présente plus de difficultés. Il m’a fallu deux ans pour apprendre, par hasard, que l’aveugle doit toujours ouvrir ses lettres lui-même. Il peut avant de les ouvrir se faire dire s’il y a des indications extérieures, indiquant la provenance (suscription commerciale ou cachet de la poste). Le contact d’une lettre quelconque donne souvent un renseignement sur sa nature. Une lettre de mendiant sur papier mince, n’est pas facile à confondre avec une lettre de dame contenue dans une enveloppe glacée et parfois reconnaissable à son parfum ou à un chiffre en relief, etc.; d’autre part des signes extérieurs peuvent être convenus d’avance avec un correspondant habituel.

Une fois la lettre ouverte, le toucher peut donner des renseignements précis sur sa nature : un prospectus imprimé ne fait pas sous les doigts la même impression qu’une carte de visite, et on ne confondra pas un chèque avec une lettre de quête.

Si l’aveugle a un doute, ce qui est le cas général, il remet la lettre dans son enveloppe, se réservant de choisir la personne par qui il se la fera lire. Une fois les lettres lues, je ne manque pas d’y poinçonner une indication suffisante pour les reconnaître ultérieurement, et savoir par qui je me les ferai relire au moment de répondre.

Je connais un aveugle qui, dans certains cas, se fait adresser une lettre poste restante, puis, après