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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/241

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les deux points principaux qu’il établit : être justifié et obtenir tous ces biens sans la loi. Aussi ne dit-il pas simplement la justice, mais « La justice de Dieu », relevant, par la dignité du personnage, la grandeur du don et la certitude de l’accomplissement de la promesse, puisque tout est possible à Dieu. Il ne dit point non plus : a été donnée mais : « A été manifestée », pour échapper au reproche d’innovation ; car la manifestation est comme la révélation d’une chose ancienne et cachée. Et non seulement ici, mais plus bas encore, il montrera que ce n’est point là une nouveauté. En effet, après ce mot : « A été manifestée », il ajoute : « Étant confirmée par le témoignage de la loi et des prophètes ».
Ne vous troublez pas, leur dit-il, parce qu’elle est donnée maintenant, comme si c’était une chose nouvelle et inouïe ; car elle a déjà été prédite autrefois par la loi et par les prophètes. Il s’est déjà servi de cette preuve pour d’autres sujets ; il s’en servira encore. Plus haut il a produit ce texte d’Habacuc : « Le juste vit de foi ». (Rom. 1,17) Puis il a parlé d’Abraham et de David, à propos d’autres questions. Ces personnages jouissaient d’une grande autorité chez les Juifs ; car l’un était patriarche et prophète, et l’autre roi et prophète, et c’était à eux qu’avaient été faites les promesses relatives à ce sujet. Aussi Matthieu, au début de son Évangile, les mentionne-t-il d’abord tous les deux, et donne ensuite les générations par ordre. En effet, après avoir dit : « Livre de la généalogie de Jésus-Christ », il ne fait point suivre le nom d’Abraham, de ceux d’Isaac et de Jacob ; mais il nomme David avec Abraham, et même, chose étonnante ! avant Abraham, puisqu’il dit : « Fils de David, fils d’Abraham » ; après quoi il énumère Isaac, Jacob et tous leurs descendants. C’est aussi pour cela que l’apôtre les cite souvent et dit ici : « La justice de Dieu étant confirmée par le témoignage de la loi et des prophètes ». Et pour qu’on ne dise pas : Comment serons-nous sauvés, nous qui ne contribuons en rien à ce dont il s’agit ? il montre que ce que nous y apportons n’est pas peu de chose, à savoir la foi. Aussi après avoir dit : « La justice de Dieu », il ajoute : « Par la foi, pour tous ceux et sur tous ceux qui croient… (22) ».
Ici encore le Juif se trouble, en voyant qu’il n’a rien de plus que les autres et qu’il est compris dans le dénombrement de toute la terre. Pour y obvier, l’apôtre le comprime par la crainte, en ajoutant : « Car il n’y a point de distinction, parce que tous ont péché (23) ». Ne me dites pas qu’un tel est Grec, qu’un tel est Scythe, qu’un tel est Thrace ; car tous sont de même condition. Si vous avec reçu la loi, vous n’y avez appris qu’une chose : à connaître le péché, et non à le fuir. Ensuite, pour qu’on n’objecte point : Si nous avons péché, ce n’est pas comme eux, il continue : « Et sont privés de la gloire de Dieu ». Ainsi, bien que tu n’aies point commis les mêmes péchés que les autres, tu es également privé de la gloire : car tu es de ceux qui ont péché ; or celui qui a péché ne compte point parmi les glorifiés, mais parmi ceux qui sont couverts de confusion. Pourtant ne crains pas : Si je dis cela, ce n’est pas pour te jeter dans le désespoir, mais pour te faire comprendre la bonté du Maître. Aussi ajoute-t-il : « Étant justifiés gratuitement par la grâce, par la rédemption qui est dans le Christ Jésus, que Dieu a établi propitiation par la foi en son sang pour montrer sa justice (24, 25) ». Voyez que de preuves à l’appui de sa proposition ! D’abord la dignité de la personne ; ce n’est point l’œuvre d’un homme qui serait sujet à défaillir, mais celle de Dieu qui peut tout : « C’est la justice de Dieu », dit-il. En second lieu la loi et les prophètes. Ne t’effraies donc point de ce mot : « Sans la loi », car la loi y consent. En troisième lieu, les sacrifices de l’Ancien Testament ; ce qui lui fait dire : « En son sang », leur rappelant par là les brebis et les veaux qu’on immolait. Si le sang des animaux, leur dit-il, purifiait du péché, à bien plus forte raison celui-ci. Il ne dit pas simplement délivrance, mais « Rédemption », afin que nous ne retournions jamais à l’ancienne servitude ; et pour cela il l’appelle « Propitiation », afin de montrer que si la figure avait déjà tant de puissance, la réalité en aura bien davantage. Et pour prouver encore qu’il n’y a là rien de nouveau, rien de récent, il dit : « A établi ». Après avoir par ces expressions : « Dieu a établi », indiqué que c’est l’œuvre du Père, il montre quelle est aussi celle du Fils ; le Père a proposé, mais le Christ a tout opéré dans son sang « Pour montrer sa justice ». Qu’est-ce que cela veut dire : « Montrer sa justice ? » Comme la richesse se prouve non seulement par ce qu’on