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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/264

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ou avec une femme, avec une femme ou avec une mule ? Et pourtant nous en voyons beaucoup négliger le commerce des femmes pour Celai des brutes, ou déshonorer le corps d’un homme : quoique les jouissances conformes aux lois de la nature soient plus agréables.
Pourtant le nombre est grand de ceux qui poursuivent comme pleines d’attraits des jouissances ridicules, désagréables, pénibles. Mais, dira-t-on, ils y trouvent du charme. Et c’est là précisément leur malheur, de croire agréable ce qui ne l’est point du tout. Par là ils se persuadent que le châtiment est pire que le péché ; et c’est tout le contraire. Car si le châtiment était un mal pour les pécheurs, Dieu n’eût point ajouté mal à mal, et n’aurait pas voulu les rendre pires ; lui qui fait tout pour éteindre le vice, ne l’aurait pas augmenté. Ce n’est donc pas le châtiment qui est un mal pour le coupable, mais la faute sans la punition, comme la maladie sang le remède. Car rien n’est mauvais comme une passion déplacée : et quand je dis déplacée, j’entends parler de la passion de la volupté, de celle de la vaine gloire, du pouvoir, en un mot de tout ce qui dépasse le besoin. Un homme de ce genre, qui mène une vie molle et relâchée, semble le plus heureux des mortels et il en est le plus malheureux, introduisant dans son âme des maîtresses incommodes et tyranniques. Voilà pourquoi Dieu nous a rendu cette vie pénible, afin de nous arracher à cet esclavage et de nous conduire à la liberté pure ; voilà pourquoi il nous menace du châtiment et associe les travaux à notre existence, afin de contenir notre mollesse.
Ainsi quand les Juifs étaient assujettis à travailler l’argile, à façonner la brique, ils étaient raisonnables et recouraient souvent à Dieu ; mais dès qu’ils furent en liberté, ils murmurèrent, ils excitèrent le courroux du Maître et s’attirèrent des maux sans nombre. Mais, objecte-t-on, que direz-vous de ceux que l’affliction a pervertis ? que c’est là l’effet de leur faiblesse, et non de l’adversité. Si quelqu’un a un estomac faible qu’un remède amer trouble, tandis qu’il – devrait le purger, ce n’est point le remède que nous accusons, mais la faiblesse de l’organe. Autant-en dirons-nous de l’infirmité de l’âme. Celui en effet qui est perverti par l’affliction, le serait encore bien plutôt par la prospérité : s’il tombe quand il est retenu par une chaîne (car l’affliction est une chaîne), à plus forte raison tomberait-il s’il était libre ; s’il est culbuté quoique lié fortement, bien plutôt le serait-il s’il était desserré. – Et comment, direz-vous, pourrais-je ne pas être renversé par l’affliction ? En songeant que, bon gré malgré, il faudra que vous la supportiez ; que si c’est avec reconnaissance, vous en retirerez de très grands profits ; si c’est avec répugnance, avec désespoir et en blasphémant, non seulement vous n’allégerez pas le fardeau du malheur, mais vous augmenterez la force de la tempête.
Dans ces pensées, acceptons de bon cœur ce qui' est l’effet de la nécessité. Par exemple quelqu’un a perdu un enfant légitime, un autre toute sa fortune ; s’il considère qu’il n’était pas possible d’éviter le coup, qu’il y a quelque profit à tirer d’un malheur irréparable, en le supportant généreusement, en renvoyant au Maître des actions de grâces au lieu de blasphèmes, il arrivera que la volonté se fera un mérite d’un mal arrivé contre son gré. Voyez-vous votre fils enlevé par une mort prématurée ? Dites : « Le Seigneur me l’avait donné, le Seigneur me l’a ôté ». (Job. 1,21) Voyez-vous votre fortune disparaître ? Dites : « Je suis sorti nu du sein de ma mère, je m’en retournerai nu ». (Id) Voyez-vous les méchants prospérer, les justes tomber dans l’adversité et subir mille afflictions, sans que vous puissiez en connaître la cause ? Dites : « Je suis devenu comme une bête de charge devant vous, et pourtant je suis toujours avec vous ». (Ps. 72) Si vous m’en demandez la raison, je vous dirai de vous figurer comme présent le jour où Dieu doit juger l’univers, et tous vos doutes se dissiperont : car chacun alors sera traité selon ses mérites, comme Lazare et le mauvais riche. Souvenez-vous des apôtres déchirés de coups de fouet, chassés, accablés de mauvais traitements, ils se réjouissaient d’avoir été jugés dignes de souffrir injure pour le nom du Christ. Si vous êtes malades, souffrez avec patience, rendez grâces à Dieu, et vous recevrez la même récompense qu’eux.
Mais comment pourrez-vous rendre grâces au Maître, au sein de la maladie et des souffrances ? Si vous l’aimez véritablement. Si les trois enfants dans la fournaise, si d’autres au milieu des chaînes ou de maux sans nombre, ne cessaient pas de rendre grâces à Dieu, à plus forte raison ceux qui sont affligés de maladies ou d’infirmités pénibles peuvent-ils le