Aller au contenu

Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/299

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’elle prononce la sentence contre le péché ? Que si l’apôtre nous dit que Dieu a envoyé son Fils dans une chair semblable,'n’allez pas vous imaginer que la chair de Jésus-Christ ait été autre que la nôtre : comme il avait parlé de chair de péché, il a dû se servir de cette expression : « Semblable ». Car le, Christ n’a pas une chair coupable ; il l’a eue semblable à notre chair coupable, de même nature qu’elle, mais impeccable. D’où il résulte clairement que la nature de la chair n’est pas mauvaise. Le Christ n’a point pris une autre chair que la chair primitive, il n’en a point changé la Substance pour la rendre capable de combattre le péché ; mais la laissant subsister dans sa nature propre, il lui a fait remporter la victoire contre le péché, et, après cette victoire, il l’a ressuscitée et rendue immortelle.
Mais, direz-vous, que m’importe que tout cela se soit passé date la chair du Christ ? Cela vous importe beaucoup ; car l’apôtre ajoute « Afin que la justification de la loi s’accomplît en nous, qui ne marchons point selon la chair (14) ». Qu’est-ce à dire, « La justification ? » Le terme, le but, le succès. Car que demandait la loi, que prescrivait-elle ? D’être sans péché. Or le Christ nous a obtenu cette faveur ; résister et vaincre, ç’a été son affaire ; profiter de sa victoire, voilà la nôtre. Désormais donc nous ne pécherons plus ; non, nous ne pécherons plus, à moins d’être absolument dénués de force et de courage. Aussi l’apôtre ajoute-t-il : « Nous qui ne marchons pas selon la chair ». Et de peur qu’en entendant dire que le Christ vous a délivré des assauts du péché, que la justification de la loi est accomplie en vous, que le péché a été condamné dans la chair, vous ne détruisiez toute l’économie de l’œuvre, l’apôtre, après avoir dit : « Il n’y a donc pas de condamnation », a ajouté : « Pour ceux qui ne marchent pas selon la chair ». Et ici, tout en disant : « Afin que la justification de la loi s’accomplisse en nous », il répète la même chose et dit même beaucoup plus. Car, après ces mots : « Qui ne marchons point selon la chair », il ajouté : « Mais selon l’Esprit » ; nous montrant par là qu’il faut non seulement s’abstenir du mal, mais aussi faire le bien. En effet, c’est au Christ de vous donner la couronne, mais c’est à vous de la conserver. Ce qui était le but de la loi, à savoir d’être exempt de la malédiction, le Christ vous l’a accordé.
6. Ne perdez donc pas un si grand bienfait ; mais conservez toujours ce précieux trésor. L’apôtre nous fait voir ici que le baptême ne suffit pas pour, le salut, si nous ne menons ensuite une vie digne d’un si grand don. Ce langage plaidé encore en faveur de la loi. Car dès que nous croyons au Christ, il faut tout faire, tout mettre en œuvre, pour que la justification qu’il a accomplie, persévère en nous et ne soit pas perdue. « En effet, ceux qui sont selon la chair goûtent les choses de la chair ; mais ceux qui sont selon l’esprit, ont le sentiment des choses de l’esprit. Or, la prudence de la chair est mort ; mais la prudence de l’esprit, est vie et paix. Parce que la sagesse de la chair est ennemie de Dieu ; car elle n’est point soumise à la loi de Dieu, et elle ne le peut (5-7) ». Ceci encore n’est point une calomnie contre la chair. Car, tant qu’elle garde son rang, il ne se fait rien de déplacé ; mais quand nous lui permettons tout ; quand, dépassant ses limites, elle se révolte contre l’âme alors elle perd tout, elle gâte tout, non par l’effet de sa propre nature, mais par son intempérance et le désordre qui en est la suite. « Mais ceux qui sont selon l’esprit, ont le sentiment des choses de l’esprit. Or, la prudence de la chair est mort ». Il ne dit pas : La nature de la chair ; ni : La substance du corps ; mais : « La prudence », qui peut se corriger et se détruire. Et s’il parle ainsi, ce n’est pas qu’il attribue à la chair une pensée propre : à Dieu ne plaise ! mais il veut désigner l’instinct de l’âme le plus grossier et lui donne le nom de la partie la plus imparfaite, comme souvent il appelle chair l’homme tout entier quoique doué d’une âme.
« Mais la prudence de l’esprit ». Ici il revient à l’âme spirituelle, comme plus bas, quand il dit : « Mais celui qui scrute les cœurs sait ce que désire l’esprit », et il fait voir que beaucoup de biens en résultent pour le présent, et pour l’avenir. En effet : la prudence spirituelle produit beaucoup plus de biens que la prudence charnelle ne cause de maux ; c’est ce que Paul indique en disant : « Vie et paix » ; l’un, par opposition à ce qu’il a dit : « La prudence de la chair est mort » ; l’autre, par opposition à ce qui suit, puisqu’après avoir dit : « Paix », il ajoute : « Parce que la prudence de la chair est ennemie de Dieu », ce qui est encore pire que la mort. Puis, pour prouver qu’il y a mort et inimitié de Dieu, il ajoute :