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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/367

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culte raisonnable, c’est-à-dire qui n’aura rien de matériel, rien de grossier, rien de sensible. Après avoir relevé, par ces expressions, l’esprit de l’auditeur, avoir montré que chacun exerce le sacerdoce par sa propre chair, par sa conduite, il indique ensuite la manière de tout faire en règle. Quelle est cette, manière ? « Ne « vous conformez point à ce siècle », dit-il, « mais transformez-vous par le renouvellement de votre esprit (2) ». Car la figure de ce siècle est basse, vile, passagère ; elle n’a rien d’élevé, rien de durable, rien de droit : c’est un renversement complet de toutes choses. Si donc vous voulez marcher droit, ne vous conformez pas à la figure de la vie présente ; car rien n’y est permanent, rien n’y est solide. Voilà pourquoi il l’appelle figure ; expression qu’il répète ailleurs, quand il dit : « Car la figure de ce monde passe ». (1Cor. 7,31) En effet, elle n’a rien de stable, ni de fixe ; tout y est passager ; voilà pourquoi il dit : « A ce siècle », pour en indiquer le peu de solidité, le défaut de consistance. Parlez-vous de richesses, de gloire, de beauté de corps, de plaisir, de tout ce qui paraît grand : ce n’est là qu’une figure, un mensonge, une apparence, un masque ; et non une substance solide. Ne vous y conformez donc pas, dit l’apôtre, mais transformez-vous dans le renouvellement de l’esprit. Il ne dit pas : Transfigurez-vous, mais : « Transformez-vous », pour montrer que le monde est une figure, et que la vertu n’en est pas une ; mais une forme vraie, possédant une beauté naturelle, et n’ayant pas besoin d’apprêts artificiels ni de figures qui paraissent et disparaissent aussitôt : car tout cela est déjà détruit avant de paraître. Si donc vous rejetez la figure, vous aurez bientôt la forme vraie.
En effet, il n’y a rien de plus faible que le vice, rien qui vieillisse si promptement. Mais comme l’homme est exposé à pécher chaque jour, l’apôtre console son auditeur, en disant Renouvelez-vous vous-même chaque jour. Faites sur vous-même ce que nous faisons continuellement pour nos maisons, en réparant les ravages faits par le temps. Vous avez péché aujourd’hui ? vous avez fait vieillir votre âme ? Ne désespérez pas, ne vous laissez pas abattre, mais renouvelez-la par le repentir, par les larmes, par la confession, par la pratique du bien ; et, en cela, ne vous relâchez jamais. Mais comment le pourrons-nous, dites-vous ? « Si vous choisissez les meilleures choses, si vous reconnaissez, combien la volonté de Dieu est bonne, agréable et parfaite ». Ou il veut dire : Renouvelez-vous pour apprendre ce qui est utile à connaître la volonté de Dieu ; ou bien : Vous pouvez vous renouveler si vous apprenez ce qui est utile et quelle est la volonté de Dieu. En effet, si vous connaissez cette volonté et si vous apprenez à distinguer la nature dés choses, vous avez trouvé le chemin de toutes les vertus. Mais, dira-t-on, qui est-ce qui ignore les choses utiles et la volonté de Dieu ? Ceux qui ne soupirent qu’après les biens de ce monde ; ceux qui regardent la richesse comme digne d’envie ; ceux qui méprisent la pauvreté ; ceux qui poursuivent les charges ; ceux qui ambitionnent la gloire extérieure ; ceux qui se croient grands, parce qu’ils bâtissent des maisons magnifiques, qu’ils se procurent de somptueux tombeaux, qu’ils ont des troupeaux d’esclaves et qu’ils sont entourés d’une multitude d’eunuques. Ceux-là ignorent ce qui leur est utile, ne connaissent point la volonté de Dieu : deux choses qui n’en font qu’une.
3. Dieu, en effet, veut ce qui nous est utile ; et ce qui nous est utile, c’est ce que Dieu veut. Or, que veut Dieu ? Que nous vivions dans la pauvreté, dans l’humilité, dans le mépris de la gloire, dans la tempérance, et non dans les délices ; dans l’affliction, et non dans le repos ; dans le deuil, et non dans la dissipation et dans la joie ; enfin dans la pratique de toutes les vertus qu’il nous a commandées. Mais là plupart les repoussent comme des choses odieuses, tant ils sont éloignés de les considérer comme utiles et comme expression de la volonté de Dieu ! Voilà pourquoi ils ne peuvent, pas même de loin, aborder les travaux qu’exige la vertu. Comment ceux qui ne savent pas même ce que c’est que la vertu ; qui, au lieu de l’admirer, admirent le vice ; qui préfèrent une prostituée à une femme chaste ; comment, dis-je, ceux-là peuvent-ils se détacher du temps présent ? Il nous faut donc, avant tout, une connaissance exacte et distincte des choses ; louer la vertu, même quand nous ne la pratiquons pas ; condamner le vice, même quand nous ne l’évitons pas ; afin de conserver un jugement impartial et sain. C’est ainsi que plus tard nous pourrons marcher et entreprendre enfin les bonnes œuvres. C’est pour cela que Paul veut qu’on se renouvelle : « Afin de connaître quelle est la volonté de Dieu ».
Il