Aller au contenu

Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/443

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

nos yeux. Je voudrais voir la poussière de ces pieds qui ont parcouru la terre, sans ressentir la fatigue, qu’on a liés contre le bois de la prison, quand il secoua et fit trembler les murailles ; la poussière de ces pieds qui franchissaient et les lieux habités et les déserts, de ces pieds toujours en voyage. Mais à quoi bon ces détails ajoutés l’un à l’autre ? Je voudrais voir la tombe où reposent les armes de la justice, les armes de la lumière, les membres maintenant vivants, et qui étaient morts lorsque l’homme était plein de vie, qui tous ne vivaient que dans le Christ, et qui étaient, comme lui, crucifiés pour le monde ; membres du Christ, revêtus du Christ, temple de l’Esprit, demeure sainte, où tout était cimenté par l’Esprit, cloué, rivé par la crainte de Dieu, empreint des stigmates de Jésus-Christ. C’est ce corps qui sert de rempart à la ville éternelle, plus invincible, plus inexpugnable que tous les forts, que tous les retranchements.
N’oublions pas le corps de Pierre ; Pierre vivant reçut les hommages de Paul : « Je retournai », dit-il, « pour visiter Pierre ». (Gal. 1,18) Et la grâce de Dieu permit, qu’avant de repartir, Paul demeurât avec lui. Je voudrais voir le lion de l’Esprit-Saint. Comme un lion ardent fondant sur des troupeaux de renards, ainsi s’élançait Paul sur les phalanges des démons et des philosophes, c’était la foudre qui exterminait les troupes de Satan. Et le maudit ne cherchait pas à lutter contre lui en bataille rangée, il en avait peur, il tremblait rien qu’à voir son ombre, rien qu’au bruit de sa voix, et s’enfuyait au loin. Voilà donc comment l’apôtre lui livra le fornicateur, pour le lui arracher ; voilà pourquoi il fit de même pour, d’autres pécheurs, afin d’apprendre aux hommes à détester le blasphème. Voyez, considérez de quelle manière il mène au combat ceux qu’il commande, quelle est son adresse à les animer, à les fortifier. Tantôt il dit aux Éphésiens : « Nous avons à combattre non contre la chair et le sang, mais contre les principautés et les puissances » ; et il montre ensuite le prix réservé dans le ciel : « Car nous ne combattons pas pour les choses de la terre », dit-il, « mais pour le ciel, et pour tout ce qui est renfermé dans le ciel ». (Eph. 6,12 ; Heb. 12,4) Tantôt il dit à d’autres : « Ne savez-vous pas que nous jugerons les anges ; avec combien plus de raison jugeons-nous les choses de ce monde ? » (1Co. 6,3)
Méditons donc ces pensées, et tenons-nous fièrement debout. Paul était un homme de la même nature que nous, par tous les autres côtés, semblable à nous, mais parce qu’il a montré la perfection de son amour pour le Christ, il s’est élevé au-dessus du ciel, et il a mérité de se tenir avec les anges. Nous n’avons donc nous aussi qu’à vouloir un peu nous relever, allumer en nous la même flamme, et nous pourrons rivaliser avec le glorieux saint. Si ce désir était impossible à satisfaire, il ne nous aurait pas crié : « Soyez mes imitateurs comme je le suis de Jésus-Christ ». (1Co. 4,16, et 11,1) Ne nous bornons donc pas à le contempler dans la stupeur de l’admiration ; mais imitons-le, afin de mériter, à notre départ d’ici-bas, le bonheur de le voir, et de participer à la gloire ineffable : puissions-nous tous entrer dans ce partage, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ à qui appartient, comme au Père, comme au Saint-Esprit, la gloire, la puissance, l’honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

Traduit par M. C. PORTELETTE

.

FIN DES HOMÉLIES SUR L’ÉPÎTRE AUX ROMAINS.