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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/578

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vous me donnez un enfant, je vous ferai une offrande d’argent. Elle dit : Ce don que vous m’aurez fait, je vous le rends tout entier : à vous, ce premier-né ; à vous, cet enfant de ma prière. Vraie fille d’Abraham ! Abraham donna ce qui lui avait été demandé : Anne prévient la demande, et donne. Et voyez eu ceci encore paraître sa piété. « Sa voix n’était pas entendue, dit l’Écriture, et ses lèvres ne remuaient point ». Ainsi s’approche de Dieu celui qui veut être exaucé : on ne le voit point s’abandonner, bailler, s’endormir, se gratter, paraître ennuyé. Est-ce que Dieu ne pouvait pas donner sans cette prière ? Est-ce qu’il ne connaissait pas déjà auparavant le désir de cette femme ? Mais s’il avait prévenu la sollicitation d’Anne, le zèle de celle-ci n’aurait pas éclaté, sa vertu n’aurait point paru dans tout son jour, elle n’aurait pas été récompensée si magnifiquement. De sorte que ce délai n’est point une marque d’avarice ni de jalousie, mais de sollicitude.

4. Quand donc vous trouverez dans l’Écriture « Qu’il avait fermé son sein ; et que sa rivale la persécutait », songez que Dieu voulait par là montrer la sagesse d’Anne. Voyez plutôt, son mari lui était attaché, il lui disait : « Ne suis-je pas bon pour toi plus que dix enfants ? Et sa rivale la persécutait » ; elle l’injuriait, l’insultait. Et jamais Anne ne répondit aux mauvais procédés de cette femme, jamais elle ne proféra d’imprécation contre elle, jamais elle ne dit : Ma rivale m’outrage, venge-moi. Cette rivale avait des enfants mais elle avait, elle, pour compensation l’amour de son mari. C’est par là qu’il la consolait, disant : « Ne suis-je pas bon pour toi plus que dix enfants ? » Mais considérons encore la sagesse d’Anne. « Et Héli crut qu’elle était ivre ». Voyez maintenant sa réponse : « Ne croyez pas que votre servante soit comme une fille de Bélial ; car il n’y a que l’excès de ma douleur et de mon affliction qui m’ait fait parler jusqu’à cette heure ». Voilà qui marque véritablement un cœur contrit : ne pas s’irriter ou s’offenser des injures, se justifier seulement. Rien n’affermit un cœur dans la sagesse, comme l’affliction ; rien n’est doux comme la douleur selon Dieu. « Il n’y a que l’excès de ma douleur et de mon affliction qui m’ait fait parler jusqu’à cette heure ». Imitons-la, tous tant que nous sommes. Écoutez, vous toutes qui êtes stériles, vous toutes qui désirez des enfants, écoutez, hommes et femmes. Car souvent les hommes se joignent à ces supplications. Écoutez ce que dit l’Écriture : « Et Isaac priait au sujet de Rébecca, sa femme, parce qu’elle était stérile ». (Gen. 25,21) Grand est le pouvoir de la prière.

« En toute instance et supplication pour tous les saints, et pour moi ». Il se nomme en dernier lieu. Que fais-tu, bienheureux Paul ? Tu te places au dernier rang ? Oui, dit-il : « Afin que, lorsque j’ouvrirai la bouche, des paroles me soient données pour annoncer avec assurance le mystère de l’Évangile, dont j’exerce la légation dans les chaînes ». Auprès de qui exerces-tu cette légation ? Auprès des hommes. O bonté de Dieu ! Il a envoyé du ciel des ambassadeurs en son nom, au nom de la paix : et les hommes les ont pris et enchaînés, sans même observer cette loi du droit des gens ; que la personne d’un ambassadeur est inviolable : Néanmoins j’exerce ma légation dans les chaînes. La captivité m’empêche de parler librement : mais votre prière m’ouvrira la bouche, afin que je puisse dire avec assurance ce que je dois dire : en d’autres termes, afin que je dise tout ce que j’ai été chargé de dire. « Et pour que vous sachiez les circonstances où je me trouve, et ce que je fais, Tychique, notre frère, et fidèle ministre du Seigneur, vous apprendra toutes choses ». S’il est fidèle, il ne mentira pas, il ne dira que la vérité. « Lequel j’ai envoyé vers nous exprès pour que vous sachiez ce qui nous concerne, et qu’il console vos cœurs ». Ah ! quel amour ! Il veut dire : afin que ceux qui voudraient vous effrayer ne le puissent pas : les Éphésiens devaient être en effet dans les angoisses : cela résulte de ces mots : « Afin qu’il console vos cœurs » : Afin qu’il vous empêche de tomber dans le découragement. « Paix à nos frères et charité avec la foi, par Dieu le Père et par le Seigneur Jésus-Christ ». Il leur souhaite la paix et la charité avec la foi. Sage précaution : car il ne veut pas que leur charité soit sans discernement, qu’ils se mêlent aux infidèles. Voilà ce qu’il veut dire ou bien il s’exprime ainsi pour qu’ils aient foi, pour qu’ils aient bonne espérance au sujet des biens futurs. La paix vis-à-vis de Dieu est en même temps la charité. En effet, s’il y a paix, il y aura charité ; s’il y a charité, il y