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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/78

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mort et de trépas, et leur en substituer d’autres pleins de douceur et d’agrément. Il appelle la mort un voyage vers le Seigneur.. Ces noms, si doux en apparence, qui expriment la vie, il les remplace par des noms peu gracieux, et la vie n’est pour lui qu’un exil où nous sommes loin de Dieu. Il en use de la sorte afin qu’on ne s’attache point au présent, qu’on s’en afflige au contraire,.que la vue de la mort réjouisse au lieu d’affliger, puisque la mort donne accès à de plus grands biens. – Mais on pourrait dire, après l’avoir entendu tenir ce langage : « Quoi donc ? Parce que nous sommes sur la terre, nous vivons loin du Seigneur ? » C’est pour prévenir cette objection qu’il ajoute : « Car nous nous avançons, la lumière de la foi, et non en contemplant Dieu lui-même ». Nous le connaissons donc ici-bas, mais moins clairement que nous – ne le connaîtrons dans le ciel. Il le dit ailleurs encore : « Nous le voyons comme dans un miroir,» ; et « en énigme ». (1Cor. 13,12) « Mais nous avons confiance et nous espérons », dit-il. Qu’espérons-nous donc ? « Nous espérons sortir du corps et nous présenter devant le Seigneur ». Quelle élévation dans ce langage ! C’est ainsi que toujours procède l’apôtre. Il s’empare des paroles de ses adversaires, et les tourne dans un sens tout opposé. C’est une remarque que j’ai déjà exprimée. « Ainsi donc nous nous efforçons de lui plaire, que nous soyons près de lui, que nous soyons loin de lui ». L’objet de nos efforts, dit-il, c’est de vivre selon sa volonté, que nous soyons au ciel, que nous soyons sur la terre. Nous n’avons rien plus à cœur qu’une telle conduite. Dès ici-bas vous jouissez déjà et avant toute épreuve, du royaume des cieux. Après avoir excité chez eux un bel désir, il ne veut pas qu’un délai trop prolongé les décourage, et c’est pourquoi il leur montre même ici-bas, comme l’abrégé, de tous les biens, qui consiste à plaire au Seigneur. Ce qu’il faut, désirer, ce n’est pas simplement de sortir de ce monde, mais d’en sortir après une vie sainte voilà ce qui rend la mort agréable ; ce n’est pas la vie elle-même qui est à charge, mais la vie passée à offenser Dieu.
3. Gardez-vous de croire qu’il suffise de sortir du corps : partout il est besoin de vertu. Quand l’apôtre parlait de la résurrection, il n’a pas voulu que ce mot nous inspirât trop de confiance, il disait : « Si cependant nous nous trouvons revêtus, et non pas nus ». De même quand il parle de la séparation de notre âme d’avec le corps, il ne veut pas que nous la regardions comme suffisante pour le salut, et il ajoute qu’il faut plaire à Dieu. Après les avoir ranimés parla vue de tarit d’objets magnifiques, il leur inspire de la crainte en leur mettant sous les, yeux des tableaux effrayants. Les avantages d’une vie vertueuse, c’est de mériter le bonheur et d’échapper auxsupplices, d’obtenir le royaume des cieux, et d’éviter les feux de l’enfer. Mais de ces deux avantages, le plus sensible, c’est d’échapper aux supplices. Quand toute la peine consiste dans une privation, la plupart s’y résignent volontiers ; mais il en est autrement, quand il s’agit d’une souffrance positive ; la privation elle-même devrait paraître insupportable ; mais la faiblesse de notre nature, sa bassesse nous fait regarder les supplices comme bien plus terribles. La vue des récompenses produisait moins d’effet sur le grand nombre que la menace des supplices éternels : et c’est pourquoi l’apôtre conclut en disant : « Tous nous devons comparaître devant le tribunal du Christ ». Après avoir ainsi produit l’effroi dans les âmes, après les avoir ébranlées par la pensée de ce redoutable ; tribunal, il ne Sépare point les menaces qui effraient des récompenses qui réjouissent, et il dit : « Afin que chacun rende compte de ses œuvres bonnes ou mauvaises ». Il fait briller aux regards des justes et de ceux qui sont persécutés des récompenses bien capables de soutenir leur ardeur, et il fait retentir aux oreilles des pécheurs des menaces bien propres à les tirer de leur négligence, et enfin il donne une preuve de la résurrection des corps. Le corps, en effet, a prêté son ministère pour le bien et pour le mal, il doit donc partager le sort de l’âme : avec elle il doit être puni, avec elle il doit être couronné.
Certains hérétiques prétendent que nous ressusciterons avec un Corps différent de celui que nous avons eu sur la terre. – Pourquoi donc, je vous le demande ? Notre corps a péché ; c’est un autre qui subira, la peine ! Notre corps a fait le bien, c’est un autre qui recevra la couronne ! Qu’avez-vous à répliquer à ces mots de l’apôtre : « Nous ne voulons pas être dépouillés, mais recevoir un vêtement plus précieux ? ». – Comment donc ce qui est corruptible peut-il être absorbé par la vie ? Saint Paul n’a pas dit : « Afin que le corps mortel