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Page:Jean Paul - Sur l’éducation, 1886, trad. Favre.djvu/13

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aussi dans l’éducation que nous donnons à nos futurs professeurs. La plus parfaite leçon de pédagogie vaut-elle une seule heure de communion avec les esprits qu’on est appelé à former ? Dans cette action réciproque du maître sur les élèves et des élèves sur le maître, le vrai maître se révèle à lui-même, et il trouve par l’inspiration ce que nulle formule ne saurait lui enseigner. Toutes les forces vives de ces intelligences qui s’éveillent mettent en branle son esprit, qui stimule à son tour leur activité, heureuse de s’exercer en toute liberté. Mais celui qui se fie à ses formules, uniquement préoccupé de les appliquer, laisse échapper toutes les occasions de s’en servir, ou bien il en fait une règle tyrannique à laquelle il soumet sans discernement tous ses élèves.

La surabondance des paroles n’est pas la seule cause de la stérilité de notre enseignement : il y a une autre cause plus profonde, c’est le manque de conviction. Nous ne savons pas communiquer ce qui n’est pas devenu une partie même de notre être ; et nos paroles sont lettre morte sans la conviction qui les vivifie. La qualité essentielle de l’éducateur c’est la sincérité : il faut qu’il croie ce qu’il dit. Alors la chaleur de sa conviction se transmet ; l’attention est captivée par sa parole toute pénétrée de l’idée qu’elle tend à exprimer, et les esprits les plus apathiques sont réveillés, les plus rebelles sont vaincus, par son irrésistible bonne foi. Cette conviction intellectuelle peut produire la même conviction dans autrui, mais