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Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/185

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qu’ils ne font pas pour manger) ces buvettes particulieres se font peu souvent entr’eux.

Semblablement aussi, soit qu’ils boivent peu ou prou, outre ce que j’ay dit, qu’eux n’engendrans jamais melancolie, ont ceste coustume de s’assembler tous les jours pour danser et s’esjouir en leurs villages, encor les jeunes hommes à marier ont cela de particulier, qu’avec chacun un de ces grans pennaches qu’ils nomment Araroye, lié sur leurs reins, et quelques fois le Maraca en la main, et les fruicts secs (desquels j’ay parlé cy dessus) sonnans comme coquilles d’escargots, liez et arrengez à l’entour de leurs jambes, ils ne font presque autre chose toutes les nuicts qu’en tel equippage aller et venir, sautans et dansans de maison en maison : tellement que les voyant et oyant si souvent faire ce mestier, il me resouvenoit de ceux qu’en certains lieux par deçà on appelle valets de la feste, lesquels és temps de leurs vogues et festes qu’ils font des saincts et patrons de chacune parroisse, s’en vont aussi en habits de fols, avec des marottes au poing, et des sonnettes aux jambes, bagnenaudans et dansant la Morisque parmi les maisons et les places.

Mais il faut noter en cest endroit, qu’en toutes les danses de nos sauvages, soit qu’ils se suyvent l’un l’autre, ou, comme je diray, parlant de leur religion, qu’ils soyent disposez en rond, que les femmes ny les filles, n’estant jamais meslées parmi les hommes, si elles veulent danser, cela se fera à part elles.

Au reste, avant que finir ce propos de la façon de boire de nos Ameriquains, sur lequel je suis à present, à fin que chacun sache comme s’ils avoyent du vin à souhait, ils hausseroyent gaillardement le gobelet : je raconteray icy une plaisante histoire, et toutesfois tragique, laquelle un Moussacat, c’est à dire, bon pere