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Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/212

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Ovide. Fastes, liv. 6., sucçoyent le sang des enfans au berceau : à cause dequoy ce nom a esté depuis donné aux sorciers.

Quant aux abeilles de l’Amerique, n’estans pas semblables à celles de par deçà, ains ressemblans mieux aux petites mousches noires que nous avons en esté, principalement au temps des raisins, elles font leur miel et leur cire par les bois dans des creux d’arbres, esquels les sauvages sçavent bien amasser l’un et l’autre. De façon que meslez encores ensemble, appelans cela Yra-yetic, car Yra est le miel et Yetic la cire, apres qu’ils les ont separez, ils mangent le miel, comme nous faisons par deçà : et quant à la cire, laquelle est presque aussi noire que poix, ils la serrent en rouleaux gros comme le bras. Non pas toutesfois qu’ils en facent ny torches, ny chandelles : car n’usans point la nuict d’autre lumiere que de certains bois qui rend la flamme fort claire, ils se servent principalement de ceste cire à estouper les grosses cannes de bois où ils tiennent leurs plumasseries, à fin de les conserver contre une certaine espece de papillons, lesquels autrement les gasteroyent.

Et à fin aussi que, tout d’un fil, je descrive ces bestioles, lesquelles sont appelées par les sauvages Aravers, n’estans pas plus grosses que nos grillets, mesmes sortans ainsi la nuict par troupes aupres du feu, si elles trouvent quelque chose, elles ne faudront point de le ronger. Mais principalement outre ce qu’elles se jettoyent de telle façon sur les collets et souliers de marroquins, que mangeans tout le dessus, ceux qui en avoyent, les trouvoyent le matin à leur lever tous blancs et effleurez : encores y avoit-il cela, que si le soir nous laissions quelques poules ou autres volailles cuites et mal serrées, ces Aravers les rongeans jusques