Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 2, 1880.djvu/195

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Pour conclusion, puis, comme j’ay monstré en la presente histoire, que non seulement en general, mais aussi en particulier j’ay esté delivré de tant de sortes de dangers, voire de tant de gouffres de morts, ne puis-je pas bien dire, avec ceste saincte femme, mere de Samuel, que j’ay experimenté que l’Eternel est celuy qui fait mourir et fait vivre ? qui fait descendre en la fosse et en fait remonter ? Ouy certainement, ce me semble aussi à bonnes enseignes qu’homme qui vive pour le jourd’huy : et toutesfois si cela appartenoit à ceste matiere, je pourrois encores adjouster que par sa bonté infinie il m’a retiré de beaucoup d’autres destroits par où j’ay passé. C’est finalement, ce que j’ay observé, tant sur mer en allant et retournant en la terre du Bresil dite Amerique, que parmi les sauvages habitans audit pays : lequel pour les raisons que j’ay amplement deduites, peut bien estre appelé monde nouveau à nostre esgard. Je sçay bien toutesfois qu’ayant si beau sujet je n’ay pas traité les diverses matieres que j’ay touchées, d’un tel style ni d’une façon si grave qu’il falloit : mesme entre autres choses confessant encores en ceste seconde edition avoir quelquesfois trop amplifié un propos qui devoit estre coupé court, et au contraire, tombant en l’autre extremité, j’en ay touché trop briefvement, qui devoyent estre deduits plus au long. Je prie derechef les lecteurs, pour suppleer ces defauts du langage, qu’en considerant combien la pratique du conteur en ceste histoire m’a esté griefve et dure ; ils reçoivent ma bonne affection en payement. Or au Roy des siecles immortel et invisible, à Dieu seul sage soit honneur et gloire eternellement, Amen.