Aller au contenu

Page:Jeanne Landre-Echalote et ses amants 1909.djvu/152

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
échalote et ses amants

— Alors, tu me trompes avec un homme ! — dit-elle à Échalote en lui prenant amicalement le bout du nez.

— À bas les pattes, — fit celle-ci, j’aime pas les attouchements. — Et puis, si tu veux mon opinion, eh bien, au respect que je vous dois à tous, j’aimerais mieux coucher avec vingt égoutiers par jour qu’avec une seule dabuche comme celles d’ici.

— Chut ! — siffla la patronne, — tu vas froisser ces dames.

— Ces dames, ça ! Tu peux leur dire que je les méprise à la course, avec un drapeau à la main.

Et sur cette sentence lapidaire Échalote, gonflant sa poitrine, soufflant dans ses joues, ressembla soudain à la grenouille de la fable.

— Non, mais qu’elles y viennent, mon mimi est là : il est à moi, je suis à lui, et zut pour les gonzesses.

M. Plusch était aux anges. On le serait à moins. Cet esclavage d’amour, crié au grand jour des becs de gaz du Frelon, lui mettait des ailes au cœur. Il sentait son orgueil s’élever dans une atmosphère d’extase. N’y tenant plus il prit Échalote à bras-le-corps et lui versa, du front au menton, tous les baisers de ses moustaches.

— À la porte les dégoûtants, — crièrent des voix au-dessus du tapis imprimé d’as de trèfle. — On ne vient pas ici pour voir ça.

Échalote s’arracha aux bras de M. Plusch, s’élança au-dessus de son bock, agita ses jambes de myrmidon et ses bras de poupée. Déjà elle allait bondir

* 144 *