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« Simplement que vous m’avez dit de monter sur les Impérials des omnibus pour mieux voir la ville. Arrivé près « d’icitte » à la gare Montparnasse, j’ai demandé à un gamin qui m’a dit de prendre le chemin de fer de ceinture et que de cette façon en montant sur l’impérial je ferais le tour de la ville.

« Je grimpais donc sur cet Impérial… « tut-tut » et voilà le train en route, d’abord je fus dans un couloir puis j’entrais dans un « tinel éiousqu’il faisait noir, il y avait une fumée du diable, de la poussière à ne pouvoir respirer et cela dura deux heures sans que je pus descendre. Et vous trouvez cela, Monsieur, « ben » correct « d’emmencher » un homme « de même » ? Que voulez-vous que je fasse maintenant, je ne puis retourner chez moi tel que je suis, sale comme un « pion ».

« Alors je dus faire préparer un bain pour le pauvre Duval, et lorsqu’il fut à peu près présentable, je le fis souper et je le reconduisis jusque chez lui.

« À toutes les rues, à tous les carrefours il s’arrêtait et disait d’une voix émue :

« C’est ben « maudit », ou bien, « ça » parle au « yable ».

Et comme je lui demandais la raison de ces exclamations, il me répondit :

« Dire qu’il s’est promené par « icitte », que son regard a vu toutes ces choses !

« Et comme je lui demandais qui, il me répondit superbe de conviction :

« C’t’histoire", Poléon, parbleu’.

« Harassé d’avoir ce bonhomme toujours à mes trousses, je résolus de m’en débarrasser… mais comment ?

« La nuit porte conseil, dit-on, et le lendemain, lorsqu’il revint, je lui tins ce langage :

« Monsieur Duval, l’air de Paris ne doit pas être salutaire pour vous, pourquoi ne voyageriez-vous un peu, visiter par exemple le beau pays de France… ?

« J’y ai pensé, Monsieur, je suis chaque jour dégoûté davantage de la vie parisienne et j’ai résolu de me rendre en Égypte.

« En Égypte ? malheureux ! lui dis-je, mais nous sommes au mois d’août et c’est en Afrique, vous comprenez, en Afrique…

« Parfaitement, hier au soir j’ai été à la « Boucane » et j’ai rencontré là une « barge » de Canayens, y avait entre eux un docteur de Lowell, dans les « States », un nommé Brindavoine, nous avons causé d’un tas d’affaires pas pareilles et je lui ai ouvert mon cœur et conté mes aventures. C’est alors qu’il m’a em-