Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 1, 1877.djvu/575

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

rien écrit ; et comment alors les écrits des autres sont-ils venus m’apprendre ici ce que vous aviez à me reprocher ? comment l’Italie possède-t-elle ce que vous n’avez pas écrit ? comment enfin me demandez-vous de répondre à des choses que vous déclarez n’avoir pas écrites ? Je ne suis pas assez dénué de sens pour me croire blessé par vous à raison d’une différence d’opinion. Mais, si vous attaquez directement ce que j’ai pu dire, si vous me demandez raison de mes écrits, en m’enjoignant de les corriger et de chanter la palinodie, sans prendre la peine de me convaincre, voilà qui porte atteinte à l’amitié ; c’est une blessure faite aux relations intimes. Pour que nous n’ayons pas l’air de nous livrer à des combats puérils, et d’alimenter les contentions de nos partisans ou de nos détracteurs réciproques, je vous écris ceci ; car je désire vous aimer d’une manière pure et chrétienne, sans rien garder sur mon cœur qui ne soit aussi sur mes lèvres. Il ne convient pas, en effet, qu’après avoir travaillé depuis ma jeunesse jusqu’à cet âge, vivant avec des modèles de sainteté dans l’étroite enceinte d’un monastère, j’ose écrire contre un évêque de ma communion, contre un évêque que j’aimais avant même de le connaître, qui le premier^ demanda de se lier avec moi, que je vis avec bonheur s’élever après moi dans la science des divines Écritures. Par conséquent, reniez ce livre, si réellement il n’est pas de vous, et [ne me pressez pas de répondre à ce que vous n’avez pas écrit ; ou bien, s’il est de vous, avouez-le sans ambages. S’il m’arrive alors d’écrire pour me justifier, la faute en retombera sur vous qui m’aurez provoqué, et non sur moi qui me serai vu dans la nécessité de me défendre.

5. Vous ajoutez de plus que vous êtes prêt, si quelque chose m’a choqué dans vos écrits, à tenir fraternellement compte de mes observations, heureux, dites-vous, de ma bienveillance. Vous allez plus loin, vous me priez d’agir de même. Encore ici je vous dis ce que je pense : vous provoquez un vieillard, vous aiguillonnez un homme qui veut se taire, vous avez l’air de vouloir faire étalage de doctrine. On ne peut pas attribuer à mon âge un sentiment de malveillance envers quelqu’un à qui je dois de la faveur. Si les esprits pervers trouvent dans les Évangiles et les Prophètes des points sur lesquels ils s’efforcent de récriminer, vous étonnerez-vous si dans vos livres, dans ceux en particulier qui ont pour objet d’exposer les Écritures, où se rencontrent tant d’obscurités, il y a des choses qui paraissent s’écarter de la ligne droite ? Ce que je dis ne signifie pas que vos œuvres, dans ma pensée déjà, renferment des passages répréhensibles ; car je n’ai pas encore pu m’appliquer à les lire, et les exemplaires n’en sont pas nombreux chez nous, si j’en excepte vos Soliloques et certains Commentaires des Psaumes. À vouloir les discuter, je vous montrerais que ces livres sont en désaccord, je ne dis pas avec moi qui ne suis rien, mais avec les anciennes versions grecques.