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Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 9, 1881.djvu/131

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la version des Septante, reprendre le fil du sens figuré, le montrant d’abord en peu de mots, comme dans un résumé, et donnant ensuite un développement plus large de chaque point.
Vos habitants, ô Ninive, c’est-à-dire les hommes mondains que désigne bien ce nom de peuple de la ville assyrienne, sont tellement énervés par les passions et affaiblis par les vices, qu’ils ressemblent à de lâches femmes : il n’y a dans leurs âmes rien de fort, rien d’énergique et de viril. Aussi les ennemis ont-ils prévalu contre eux : ils ont ouvert tous leurs sens, et ils sont entrés en eux par ces portes du corps. Le nom de portes de la terre de Ninive, donné aux sens corporels, est caractéristique. Même ceux qui se sont fait les esclaves des vices ont, dans l’exhortation de connaître Dieu par l’image qu’il a d’abord créée en eux, comme des battants des plus solides pour fortifier et fermer au verrou les portes des sens. Mais le feu qui vole sur les flèches enflammées consumera tout cela, jusqu’aux verroux mêmes. Voilà pourquoi il est dit à Ninive : « Puisez de l’eau pour vous », abreuvez-vous de parole et déraison, et armez – vous pour le combat des occasions de connaître Dieu et d’exercer les vertus qui ont été semées en vous. Vos mains languissantes, c’est-à-dire les"' œuvres de plaisir, ont ruiné tout ce qu’il y avait de force en vous ; changez donc de voie, faites pénitence, acquérez de nouveau les vertus qui étaient vos remparts. Puisque vous êtes entrée dans l’argile, que vous êtes close dans le corps, pétri de chairs, de sang, de veines, de nerfs et d’os (comme un mortier est fait de terre, de paille et d’eau), soutenez les attaques auxquelles le corps est nécessairement en butte : que les ennemis vous foulent aux pieds ; endurez toutes les phases de la formation de la chair, tout ce qui doit conduire aux fruits de la pénitence. Dès que vous portez le fardeau de l’argile, que vous êtes enveloppée des pailles et des vaines affaires de cette vie, vous devez volontairement accepter l’injure d’être foulée aux pieds ; mais gardez-vous de répudier tout espoir de salut ; pleine de confiance, au contraire, puisez l’eau de la parole, réduisez en servitude votre corps, façonnez en brique cette argile pour vous l’assujettir et la dominer. Que si vous ne faites cela, plus tard la flamme dévorante vous consumera, allumée ou dans la géhenne pour votre châtiment, ou dès ici-bas par les traits brûlants de l’ennemi. Et non seulement vous serez la proie du feu, mais l’épée vous anéantira comme la sauterelle dévore toute plante verte à la surface du sol. Voilà les maux qui vous attendent, si vous ne vous élevez pas au-dessus de la brique, et si, accablée sous votre propre poids et incapable de tout essor, vous êtes tout entière entraînée sur la terre, comme le hanneton tombe tout à coup sur le sol, quand ses ailes fatiguées ne peuvent le porter plus loin. Que vos vertus soient donc innombrables comme les hannetons pressés en nuage, afin que votre poids ne vous fasse point retomber