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Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 9, 1881.djvu/194

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corps de mort. Par les sceptres ou royaumes du diable, qui les montra à Notre-Seigneur, il faut entendre les différents péchés : l’avarice, la luxure, la colère, la médisance, les vols, les parjures, contre lesquels la parole de Dieu, montée sur ses chevaux et sur ses chars, dirige les traits terribles de sa foudre, et attend toutefois à les lancer, afin que celui qui aura été frappé de crainte à la vue de l’arc tendu, ne soit point frappé par les flèches quand elles seront lancées. C’est ainsi qu’il agit « toujours », scion l’interprétation qu’Aquila a donnée de Sela, au lieu du diapsalma des Septante ; car il est toujours porté par ses saints et toujours sous les armes ; il va sur ses chevaux, préparant ses flèches aiguës contre la langue de l’impie, et il se porte de tous côtés pour le salut du monde.


« Vous diviserez les fleuves de la terre. » [1]. Les Septante : « Les fleuves diviseront la terre. » Le Seigneur ayant suscité son arc pour accomplir les promesses qu’il avait faites avec serment aux tribus, il lui est dit conséquemment : « Vous diviserez les fleuves de la terre », c’est-à-dire, vous diviserez et vous disperserez les rois de la terre qui combattaient contre votre peuple. Quant à l’interprétation des Septante ; « La terre sera divisée par les fleuves », afin de l’expliquer, posons un exemple, qui nous servira comme d’échelon pour nous élever plus haut. Dans les écrits de ceux qui ont recueilli les événements les plus extraordinaires, et qui ont prolongé les Olympiades de la Grèce jusqu’à notre époque, eu rapportant année par année tout ce qui arrivait de nouveau dans le monde, nous lisons, entre autres choses, que des tremblements de terre ont fait jaillir des fleuves qui n’existaient pas, taudis que d’autres étaient absorbés et disparaissaient dans les entrailles de la terre. C’est que, sans doute, toutes les veines de la terre, de même que celles du corps humain, sont chargées de sang, sont pleines d’eaux cachées, qui les rompent quand la terre est ébranlée, et jaillissent en fleuves. Gela compris, nous comprendrons aussi comment l’âme humaine contient, par sa nature, des eaux et des fleuves qui demeurent cachés et ne coulent pas à cause de notre indolence. Mais lorsque la prédication de la parole de Dieu a secoué l’âme et qu’elle est sortie de son engourdissement, alors les eaux cachées jaillissent et coulent pour la réfection de ceux qui les boivent. C’est, à mon avis, ce que signifient, dans la Genèse, les puits creusés de nouveau par les serviteurs d’Isaac, parce qu’ayant été faits d’abord par Abraham, ils avaient été ensuite comblés de terre par les Philistins. [2]. Tant qu’Abraham est vivant, les puits qu’il a faits ne sont point fermés ; lui mort et les puits comblés, si les serviteurs les rouvrent, ils sont en contradiction avec les Philistins, et il y a querelle. Mais si Isaac vient lui-même, qu’il creuse un puits et qu’il trouve l’eau, les Philistins sont impuissants à l’empêcher. Qu’on songe

  1. Hab. 3, 10
  2. Gen. 26, 1