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Page:Jevons - La monnaie et le mécanisme de l’échange.djvu/87

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métaux ne coïncidait plus avec celui qui était impliqué par les poids relatifs des monnaies, il fallait fixer par une proclamation royale une nouvelle valeur de l’un des métaux relativement à l’autre. De 1257 à 1664, la circulation de l’or et de l’argent en Angleterre fut réglée ainsi, et l’on continua à n’émettre aucune monnaie de cuivre ou d’un métal inférieur quelconque. De 1664 à 1717, on ne fit à ce sujet aucune proclamation, et on laissait exprimer en shellings la valeur variable de la guinée. À une certaine époque elle s’éleva presque à 30 shellings, ce qui était dû en partie à la valeur décroissante de l’argent, mais surtout à ce que la monnaie d’argent était usée et rognée. Pendant cet intervalle le pays eut donc un étalon unique d’argent.

Dans la première partie du dernier siècle il y eut de longues discussions sur l’état fâcheux de notre monnaie d’argent, et sir Isaac Newton, directeur de la Monnaie, fut prié de faire un rapport sur les meilleures mesures à adopter. En 1717 il présenta ce rapport célèbre où il recommandait au gouvernement de fixer comme auparavant le prix de la guinée, et il proposa la valeur de 21 shellings comme la meilleure. Son avis ayant été accepté, la guinée a toujours été depuis lors évaluée à 21 shellings. Il y eut donc encore une fois en Angleterre deux monnaies légales, chacun pouvant employer l’une ou l’autre à faire ses paiements. Toutefois, dans la pratique, il est presque impossible que la valeur commerciale des métaux puisse coïncider avec le taux légal. Au taux adopté par sir Isaac Newton, l’or recevait une sur-valeur de plus de 1 1/2 pour cent ; c’est dans cette limite que sa valeur monétaire dépassait sa valeur métallique. Aussi, conformément à la loi de Gresham, et aux principes que nous avons exposés au chapitre VIII, la monnaie d’argent de bon poids fut retirée ou exportée, et l’or devint dans la pratique la mesure de la valeur, et n’a pas cessé de jouer ce rôle.

Dans toutes les autres parties du monde où l’on a fait des tentatives pour combiner deux métaux comme unités parallèles de valeur, il s’est produit des résultats semblables. Dans le Massachusetts, en 1762, l’or reçut, au taux de 2 pence 1/2 par grain, le cours forcé, que l’argent possédait seul jusque-là ; mais ayant reçu ainsi une sur-valeur de 5 pour