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LES AMOURS

<poem> Lors qu’estant avec Anne, Antoinet[t]e[1] enchaînée Tous nos esprits seront l’un de l’autre embrassez, Et meslez l’un dans l’autre, et sans estre lassez De cognoistre l’autre ame estre pour l’autre nee ?
Plus tost que ce doux bien m’eschape hors des mains, Et qu’Amour et les Dieux me soient tant inhumains, Je désire, ô Amour, que tu changes ta fleche
À celle de la Mort, à fin de m’en tuer : Mais, si tu fais ce bien, que pour perpétuer Ton fait, jamais la Mort n’y puisse faire breche.

XXXVI


Tout cet hiver par l’aspre et l’aigre vehemence De longue maladie, a sur moy tempesté Plus que sur un vaisseau dans la mer to[u]rmenté, N’eust fait son orageuse et froide violence.
Mais de mes maux, le pire estoit la dure absence De mon soleil, sans qui je hairois la clarté De l’autre, qui m’ayant son Printemps présenté, De ma Dame me rend quand et quand la presence.
Mais comme de l’hiver la queuë on voit durer, Le Printemps fait mon corps aussi bien endurer Que l’hiver, et le ciel de mes maux ne se lasse,

  1. Le poète fait ici allusion au baron d’Annebaut et à sa première femme, Antoinette de la Baume-Montrevel. Voir notre note de la p. 60.