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le robinson suisse.

bûchers durant toute la nuit, je fis des flambeaux ou torches à la manière des habitants des Antilles, avec des cannes à sucre pleines de leur jus. Après les avoir allumées, je les plantai en terre à droite et à gauche de notre tente. Nous plaçâmes à côté de nous nos armes chargées ; les chiens furent placés en sentinelles. Tout le monde s’endormit, excepté moi, qui restai debout jusqu’à minuit pour entretenir le feu ; puis je me couchai comme les autres.

Le lendemain matin, après un modeste déjeuner fait à la hâte, nous résolûmes de ne rien négliger pour retrouver maître baudet. Je partis avec Jack et suivi des deux chiens, ayant averti ma femme que nous devions parcourir les environs et surtout le champ de bambous, et être de retour à midi ; en notre absence, elle voulut s’occuper avec ses fils à couper des cannes à sucre, à recueillir du vin de palmier et des noix de coco.

Jack était fier et heureux de m’accompagner, cette fois, à la place de Fritz ; il désirait depuis longtemps faire une excursion avec moi ; mais, de crainte d’un refus, il n’avait pas osé m’en parler. Nous avions eu soin de prendre nos armes à feu, nos haches et une petite scie.

Après avoir traversé, non sans peine, les bambous, partout fort serrés les uns contre les autres, nous aperçûmes sur la terre un peu humide les empruntes du sabot de l’âne ; plus loin coulait une rivière assez large, puis se dressaient devant nous des rochers à pic. Nous traversâmes la rivière, et, ayant péniblement escaladé les rochers, nous revîmes encore les traces de notre âne, mais, à côté des siennes, il y avait une quantité d’autres traces de pieds, qui en différaient par la forme et par la grandeur. Cette découverte redoubla notre ardeur, et, suivant toujours ces traces, nous arrivâmes au haut d’une colline d’où nos yeux s’étendirent sur un pays riant et enchanté, vrai paradis terrestre : à notre droite les montagnes aux sommets perdus dans les nuages, aux formes variées, aux teintes grises et bleues ;